Parmi les nombreuses communautés qui composent La Réunion, les arabes, que l’on prononce « zarabes », représente environ 5% de la population et participent activement à la vie sociale, politique et économique. Mais d’où viennent-ils et quand étaient-ils arrivés dans le pays ?
Les arabes de La Réunion ne sont pas réellement des arabes. Il s’agit plutôt d’indiens provenant de l’Ouest de l’Inde, plus précisément de la région de Gujarat. On les appelle des arabes parce qu’à leur arrivée, au XIXème siècle, ils portaient des chapeaux rouges cylindriques comme ceux que portaient les marocains. On les assimilait donc à des arabes et ce nom leur a poursuivi jusqu’à aujourd’hui. A noter que les zarabes sont arrivés à La Réunion comme travailleurs engagés. Une fois arrivés sur l’île, ils ont décidé de garder leur culture et leur religion (musulmane et d’obédience sunnite pour être plus précis). S’ils étaient peu nombreux à leur arrivée, d’autres les ont ensuite rejoint et ont donc contribué à accroître leur effectif.
Les zarabes constituent actuellement 5 % de la population réunionnaise. Très actifs sur le plan économique, on les retrouve dans presque tous les domaines. Cela dit, le commerce reste le domaine où cette communauté est la plus dynamique. Elle se spécialise dans le commerce de tissus et occupe à elle toute seule 40 % de l’économie réunionnaise. Depuis le début du XXème siècle, les zarabes ont été considérés comme les bienvenus à La Réunion et pour marquer ce fait, leur première mosquée y a été instaurée en 1905. Elle se trouve dans la capitale actuelle de l’île, à Saint-Denis.
Dans les statistiques démographiques, ce groupe n'occupe finalement qu'une place minime, nous l'avons vu : sans doute autour de 3% de la population totale. Pourtant, les touristes comme les Réunionnais de souche qui arpentent les rues commerçantes des villes du littoral, les croiraient aisément beaucoup plus nombreux, tant leur présence est visible, tant est manifeste leur rôle incontournable dans l'économie locale. (Photo1, photo2).
L'ensemble indo-musulman - qui ne constitue d'ailleurs pas l'intégralité de la population de confession islamique, puisqu'on compte environ cinq milliers de Comoriens - n'est pas monolithique, contrairement à ce que l'on a tendance à observer de l'extérieur. Il est vrai qu'aujourd'hui la différenciation entre Baïssab et Surti n'est plus qu'anecdotique et fait référence à un passé révolu où ont pu exister quelques querelles, dignes de Clochemerle, entre immigrants originaires du district de Surate ou de celui de Broach. De nos jours les familles et les intérêts se sont plus ou moins intimement mêlés et confondus, et cette entité gujerati est donc foncièrement unie. En particulier autour du rite sunnite hanafite qui constitue son premier ciment. Reconnaissons toutefois que c'est avant tout le cercle familial qui constitue le premier microcosme de référence, avec parfois les antagonismes que cela suppose.
S'il faut trouver un clivage net, c'est certainement entre, d'une part, la grande majorité des Z'Arabes< que nous venons d'évoquer, installés sur l'île à partir du XIXème et jusque vers 1935 (Date d'un décret mettant un terme à la venue d'étrangers.), naturalisés, avec souvent bien des difficultés et autres tracasseries administratives à partir de 1946 (Année de la départementalisation), et d'autre part la minorité "karane", chassée de Madagascar dans les années 1970 par la situation devenue inconfortable {Les Indiens que l'on appelle Karanas à Madagascar, sont venus à la Réunion en trois vagues (en 1972, en 1986 et en 2002). Ce pays a connu durant ces trois périodes des événements politiques importants. Ils sont venus à la Réunion car ils étaient français. Ils sont venus de leur propre gré car ils ont estimé que Madagascar était devenu un pays politiquement instable. Mais en aucun cas ils ont été chassés de Madagascar. " (Note d'un lecteur)}.. Les quelques centaines de Karanes - un terme non exempt de nuances péjoratives - eux aussi d'origine gujerati, sont d'obédience chiite. J'ai entendu parler, pour définir le type de relations entre les deux communautés, de "cohabitation distante", d' "impression de ne pas appartenir à un même groupe", même si peuvent bien sûr exister quelques liens, à titre individuel. En fait les Indo-Musulmans de Madagascar sont largement méconnus, pour ne pas dire ignorés, de l'ensemble de la population réunionnaise, y compris de leurs coreligionnaires. Certains les décriront comme suffisants, affichant une certaine supériorité attribuée à une aisance déjà ancienne, à une tradition quasi intellectuelle: études en écoles françaises sur la Grande Ile, universités en Métropole... Il serait hâtif et caricatural de souscrire d'un bloc à ce point de vue. Les Karanes n'ont certes pas de racines encore profondément ancrées dans la terre réunionnaise, mais y a-t-il une des communautés de l'île qui ne soit pas passé par ce stade d'acclimatation sociale avant l'intégration. Gageons que celle-ci se fera, d'une façon ou d'une autre, et que les Karanes sauront contribuer à l'édification de la mosaïque culturelle de l'île en y apportant quelques unes de leurs spécificités, ainsi que l'ouverture ou la liberté d'esprit qu'on leur prête et que, sans vouloir en faire une règle absolue, j'ai constatée.
Puisque nous en sommes à l'évocation de minorités, j'ouvrirai ici une rapide parenthèse pour signaler l'existence de cent à cent vingt Gujerati de religion hindoue, auxquels les férus d'étiquettes plus ou moins justifiées associeront celle de "Banians" (généralement perçue comme péjorative). Eux aussi sont en provenance assez récente de Madagascar, les racines indiennes plus lointaines étant à chercher dans des districts plus septentrionaux que ceux des Z'Arabes déjà évoqués. Beaucoup exercent des professions artisanales ou libérales : pharmacie, bijouterie...
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