Si l’on aime les paradoxes, on dira facilement qu’à la Réunion l’âme indienne est partout, et nulle part... Partout : dans ces champs de canne où elle transpire et sabre, dans le son de ces tambours qui monte jusqu' aux écarts de la nuit, dans le goût brûlant de ces caris, dans la brûlure de ces braises où s’enfoncent les pieds nus des pénitents comme jusqu'au plus ardent de la foi ancestrale, dans le sang mêlé de ces visages cafres, derrière ces superstitions et dans ces élans vers un avenir incertain, dans ces mosquées, ces chapelles et ces temples, dans les noms et les mots, au fond de ces boutiques où s’entassent plateaux d’acier, guirlandes, vidéos droit venues de Madras la lointaine... Nulle part : car où qu’on la touche et où qu’on la sente, on la sent créole, cette âme ; et l’on touche, dans chaque chose de l’indianité réunionnaise, à ce que cette chose a de métis.
Les paradoxes ont ceci de flatteur pour l’esprit qu’ils semblent, derrière ce que l’on a cru d’abord n’être qu’un effet de clinquant et que l’on se plaît juger ensuite comme un raccourci virtuose, éclairer en peu de mots et brillamment les vérités opaques, les réalités les plus insoupçonnées. Et pourtant... il n’y a sans doute là ni plus ni moins de vérité qu’en n’importe quelle affirmation sensée. En aucune façon ces premières lignes ne se veulent donc autre chose qu’une "façon de parler", ni ce site LE document objectif et exhaustif sur LA réalité de la culture indienne à la Réunion. Si l’on y trouve quelques questions, n’y voyons pas de simples effets rhétoriques mais l’écho de réelles interrogations. Et si l'on croit y lire des affirmations abusivement généralisantes, que l'on sache toujours les relativiser, ce que je n'ai fait explicitement qu'à quelques reprises, pour de simples questions de lourdeurs stylistiques à éviter...
Il y aurait sur le sujet matière à écrire aussi bien un essai ethnographique qu’un roman historique, de pittoresques pages pour touristes en mal d’exotisme comme les vers les plus pathétiques ou les plus colorés. Certains s’y sont essayés. On les lira avec intérêt. Ma prétention est seulement de donner à voir, sans pour autant oublier de comprendre un peu mieux ce qui ne s’arrête pas aux apparences. (Photo4, Photo5).
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