a danse kathak
est la plus importante de l'Inde du Nord et remonte à l'époque des troubadours nomades
justement appelés kathaks, c'est-à-dire conteurs d'histoires. Dans les régions
de Bénarès, d'Ayodhya... sur les places des villages ou dans les cours de temples
où ils se produisaient pour gagner leur vie, leur habitude était d'agrémenter leurs
récits mythologiques - la geste de Râma, les épisodes du Mahâbhârata, etc. -
de toute une gestuelle et une mimique expressives qui se codifièrent peu à peu. La
musique, vocale et instrumentale, accompagnait le tout. Le kathak s'est si bien perpétué
qu'à l'époque moghole on l'a pratiqué dans les milieux les plus élevés de la
société et jusque dans les cours royales. Les influences musulmanes, persanes, se sont
mêlées aux origines hindoues pour aboutir à un style raffiné et très rythmé dans
lequel la dimension narrative et théâtrale a perdu de son importance.
C'est le travail des pieds qui frappe le plus dans le
spectacle de kathak, ainsi que les pirouettes impressionnantes de rapidité s'achevant sur
des poses momentanément figées et dignes de la statuaire indienne. On dit qu'une
danseuse doit pouvoir faire tinter s'il le faut un seul des trois cents grelots qu'elle
porte aux chevilles ! Il faut donc que l'interprète fasse montre d'une maîtrise
parfaite de ses vifs mouvements de jambes et de pieds : les grelots ainsi agités doivent
en effet suivre strictement le rythme de la musique. Musiciens et danseuse rivalisent de
rapidité et de virtuosité jusqu'à atteindre des sommets vertigineux où peuvent se
côtoyer technicité, spiritualité et érotisme voilé. Mais, comme dans la plupart des
autres formes de danse classique indienne, le jeu des expressions du visage ou les gestes
symboliques ou mûdras ne sont pas absents (même s'ils occupent une place moins
importante que dans le bhârata-natyam par exemple). Souvenez-vous des scènes
inoubliables de danse dans le Salon de musique du cinéaste Satyajit Ray !
Certaines sources lient la pratique du kathak à une ancienne
institution comparée à celle des geishas japonaises : les tawaifs, que les Britanniques
condamnèrent en l'assimilant peu ou prou à de la prostitution. cela explique le déclin
de cette danse pendant le long épisode historique du Raj britannique. Mais il
s'et maintenu et existe toujours, aussi, toute une tradition masculine transmise de
génération en génération. Quoi qu'il en ait été, de nos jours, le kathak a été
remis à l'honneur et trois "écoles" importantes, ou gharanas, sont
particulièrement réputées : celle de Bénarès, celle de Jaïpur et celle de Lucknow,
chacune ayant ses petites spécificités.
Les costumes de kathak encore en vigueur de nos jours
semblent assez directement inspirés de l'époque moghole et sont comparables à ce que
l'on peut voir sur les fameuses miniatures de cette période : pour les femmes, ample et
longue jupe très colorée et bustier serré appelé kanchuli ; pour les hommes, pantalon
étroit et une sorte de longue redingote.
L'orchestre est souvent assez riche. La partie rythmique est
assurée par les percussions typiques de la musique hindoustani : tablâs et pakhawaj. A
côté d'eux, on retrouvera notamment le sitar ou le sarod qui est assez similaire, le
sarangi (instrument à cordes d'origine arabe), le dilruba ou l'esraj (deux instruments en
quelque sorte à mi-chemin du simple sarangi et du plus complexe sitar), l'harmonium, la
flûte de bambou bansuri et d'autres encore.