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Une présence qui accroît l'hétérogénéité "raciale"
Avec ses quelque 400.000 habitants, la Martinique constitue désormais un carrefour
impressionnant de races, dethnies et de cultures. Des raisons historiques, sa
position géographique, ses statuts de DOM et de Région ouvert(e) sur lEurope...
constituent sans doute quelques uns des paramètres les mieux à même dexpliquer
une telle hétérogénéité. Cest sans doute parce que les répercussions de cette
forte hétérogénéité sont neutralisées par une régulation du lien social par la
métropole, que tant de diversité trouve à sexprimer dans un cadre si étroit.
Ainsi se trouvent aplanies les rivalités ethniques en leurs formes politiques les plus
morbides.
Des yeux exercés et curieux de saisir la dynamique générale qui confère
son caractère de « société » à la Martinique, distingueront vite le
superficiel de lessentiel. Autrement dit, ils sauront, dans ce qui à un grand
nombre dobservateurs sapparente au chaos, discerner les règles qui constituent les soubassements de
la dynamique et de la régulation sociales dun pays dont lhétérogénéité
ethnique, qui ferait frémir ailleurs, a le mérite - tant bien que mal sans doute -
dêtre fonctionnelle et celui encore plus grand de signaler aux observateurs les
plus superficiels quelle est habituée à la tolérance et à la mixité
ethno-culturelle. Trait caractéristique dont on na pas encore mesuré le progrès
social quil représente. Sorti de cette somme de lieux communs, la question
essentielle qui restera à poser sera celle du comment
cette dynamique est-elle impulsée, quelle(s) forme(s) de pouvoir la sous-tend(ent), quel rapport au
pouvoir entretiennent les groupes en présence, quelles formes de neutralisation des
divergences culturelles sont fonctionnelles... Les quêtes identitaires demeurent
néanmoins très actives dans ces microcosmes bouillonnant que sont les sociétés
antillo-guyanaise, qui donnent parfois le sentiment que lon ny vit que de
« culture » et deau fraîche.
Le fait cependant
quau niveau des représentations, la société martiniquaise soit conçue comme une
entité bicéphale, à deux composantes ethniques donc (Noirs/gens de couleur et békés),
réduit considérablement la perception que lon a réellement de
lhétérogénéité ethnique de cette société. Plus que le rapport numérique de
population, cest sans doute la force dimpact induite par lhistoire de
cette région et le fondement dun lien de type très particulier entre les deux
populations qui lont fondée, qui expliquent la saillance de cette bicéphalité. De
manière générale, en effet, la population martiniquaise sappréhende par ses
composantes « noire/de couleur » et « békée ». Les conditions
dans lesquelles la composante indienne va venir sajuster à ce corps social
expliquent quil demeure un élément périphérique de la société créole. Ce
nest pas le seul fait du hasard si les visiteurs étrangers se montrent toujours
très surpris dapprendre lexistence dIndiens à la Martinique. La
faiblesse des effectifs du groupe explique quil na pas vraiment marqué de son
empreinte la société créole et quau contraire celle-ci ait plutôt eu tendance à
labsorber par miscégénation.
Cest en effet au cur dune dynamique sociale déjà
fortement structurée par deux siècles de cohabitation, et fonctionnelle par conséquent,
que lIndien se voit projeté. Il fut désiré par les planteurs de la colonie comme
« élément neutre ». Il demeurera longtemps un « élément neutre»
qui, malgré sa bonne volonté et le désir dintégration quil afficha de
longue date, mettra du temps à
sajuster au nouveau corps social qui a eu plus vite fait de labsorber sans le
voir que de lintégrer véritablement.
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