Interview
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IR : Pascal Héni, vous êtes à présent devenu une star
sous le nom de Pascal of Bollywood : qu'est-ce qui, selon vous, vous a fait
rapidement passer de l'ombre aux projecteurs du vedettariat ? Comment
expliquez-vous votre succès ?
PH : Je suis
compositeur et interprète, parfois auteur. J’ai fait plus de
trois cents chansons et j’ai réalisé six albums. Ma
carrière a toujours été très satisfaisante car je n’étais jamais frustré
artistiquement. J’ai toujours été intègre sur ma ligne, mes choix
artistiques ; c’est la sincérité qui est mon moteur principal pour aller
jusqu’au bout de tous mes projets. Pour ce qui est du succès avec les chansons du cinéma
indien, tout s’est passé très simplement ; en 2001, j’ai décidé de partir pour
la première en Inde, j’ai chanté et tout est allé très vite. Avec l’aide de
l’Ambassade de France en Inde, j’ai fait une tournée dans toute l’Inde. Durant
cette période, j’ai eu un beau succès médiatique car c’était la première fois
qu’un chanteur occidental reprenait leurs chansons populaires en hindi, tamoul
et bengali.
Ce qui est amusant, c’est que les médias ont beaucoup
parlé de moi en France - de temps en temps avec une certaine exagération - grâce
à mon aventure indienne… Il aura fallu que je fasse un grand détour… Je pense
que la reconnaissance est indispensable pour tout artiste.
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IR : Votre intérêt pour la chanson indienne, votre passion
pour elle, remontent-ils à votre enfance, ou sont-ils plus récents ?
PH : Il y a
plus de vingt ans, j’ai découvert ces chansons pour
la première fois, non pas en Inde mais en Malaisie dans le « Little India » de
Kuala Lumpur. J’ai été tout de suite frappé car ce style débridé et cette musique
si imaginative correspondait exactement à ma personnalité.
Ce n’est qu’en 2001 que je suis parti en Inde pour la
première fois afin d’y préparer ce projet de réinterprétation des chansons du
cinéma indien en langues hindi, tamoul et bengali.
PH : A
partir du moment où j’ai décidé de réaliser ce projet, j’ai d’abord
écouté et réécouté des centaines de chansons. Une véritable
passion.
Ensuite, fasciné par le son des langues indiennes
idéales pour la voix et le chant, j’ai très vite compris qu’il fallait avoir une
prononciation irréprochable. J’ai donc travaillé à Paris pendant plusieurs
années avec un professeur indien de l’Inalco. Ceci aussi pour comprendre le
sens des paroles, l’interprétation et explorer les nouvelles inflexions vocales.
Je pense que les Indiens y ont été sensibles.
PH : Étant aussi acteur, je crois que c’est la dynamique très
cinématographique de ces chansons qui m’a tant plu. La musique et les paroles
suivent les scintillements des images ; c’est de la chanson visuelle !
J’ai aussi aimé la liberté harmonique, rythmique et
mélodique de ces compositions, néanmoins très exigeantes puisque la musique
classique indienne et ses ragas y sont omniprésents.
Par ailleurs, j’ai retrouvé beaucoup de similitudes dans
les structures et les mélodies, avec la chanson occidentale, et en particulier
la chanson française. Il est vrai ces chansons du cinéma sont un véritable
« melting pot » d’influences du monde entier tout en restant très indiennes ; c’est
cela qui m’a fasciné.
PH : Non, pas vraiment, c’est un monde très différent dans
lequel je ne retrouve pas de repères. Cela demande, comme je l’ai fait avec les
chansons du cinéma, une réelle immersion car ce monde musical est bien différent
de celui de ma culture d’occidental. Cela dit, je peux apprécier certains
morceaux et j’avoue que dans ce cas, j’ai un faible pour le côté frénétique et
originel de la terre carnatique.
PH : Ce que j’aime le plus, c’est la juste balance entre la
voix, le texte, la mélodie, le rythme et les arrangements qu’on retrouve dans
les chansons des années 40 jusqu’aux années 80.
Ensuite, la musique s’est assagie et formatée au profit
de l’obsession de la perfection du son. C’est pourtant dans les défauts, dans la
folle saturation des prises de violons, que l’on trouvait le plus d’émotions.
« Old is gold ! »
PH : Il ne faudrait pas réduire en un seul cliché toute
l’industrie du cinéma indien qui est énorme et très diversifiée.
C’est aussi, depuis le tout début de l’invention du
cinéma, un moyen pour les Indiens de matérialiser à l’écran les choses les plus
spirituelles (leurs dieux, la critique de la société, les amours possibles et
impossibles, etc...).
Ainsi, quand une chanson apparaît dans un film,
ce sont
les mouvements intérieurs des personnages qui sont montrés par la chanson, et
cela dérape dans une expression de rêve tragique ou joyeux. C’est encore le cas
dans le cinéma actuel ; c’est toujours musical.
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IR : Avez-vous, parmi les chanteurs indiens ou autres, des
modèles ou, du moins, des artistes de prédilection ?
PH : J’aime Kishore Kumar, Suraiya, Rafi, Raj Kapoor, Nargis…
j’aime SPB, j’aime MGR… mon modèle de fashion… rajavin parvai raniyin pakkam...,
j’aime Ilaiyaraaja, j’aime l’acteur Aamir Khan, le
designer Rohit Bal…
PH : Le public indien a été touché par ma sincérité. Surpris
et flatté aussi ; car c’était la première fois qu’il voyait ça. Suivant les
régions, les réactions sont aussi différentes. Je pense aussi que ma voix et que
mon interprétation de chanteur français ont apporté un nouvel éclairage sur ces
grands succès populaires.
PH : Je pense avoir participé à l’engouement actuel pour le
cinéma indien en France.
J’ai beaucoup chanté dans les festivals en France et
en Europe et j’ai pu voir un public très diversifié. Beaucoup de femmes, beaucoup
de jeunes, ce qui me ravit.
PH : Je repars en Inde pour un grand concert au
théâtre NCPA de Mumbai donné le 21 mars. Je vais y présenter pour la première
fois les nouvelles chansons sur lesquelles je travaille actuellement pour
mon prochain album.
Je reste en Inde pour enregistrer ces chansons de ma
composition sur des arrangements indiens, cette fois-ci avec des paroles en
français. Cet album sortira en France chez Naive en septembre 2008.
Je travaille aussi sur un projet de spectacle et d’album
sur « La Divine Comédie » de Dante, dont j’ai mis trois chants en musique, pour
2009/10.
J’ai quelques amis, mais je ne connais pas bien le
milieu indo-réunionnais. Je sais que beaucoup de gens me connaissent et
j’aimerais beaucoup chanter dans votre île aux richesses culturelles diverses et
dont je sais aussi que la nature est très belle.
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