Interview
KR : Je m'appelle Kamini Akila Rangaradjou. Je suis danseuse
et professeur de Bharata Natyam.
KR : Ma mère m'a transmis sa
passion pour la musique et la danse. Bharati Vayaboury, diplômée de Kalakshetra, me fit découvrir le Bharata
Natyam. C'est auprès de Bharati Vayaboury que j'ai débuté mon apprentissage à
l’âge de six ans, au sein de la troupe Apsara.
KR : J’ai fait mes premiers pas sur scène lors des
représentations d’Apsara dans les petites et grandes salles réunionnaises
durant les manifestations culturelles, mais aussi au profit d’organisations
humanitaires. J’ai participé aux tournées de la troupe à Maurice et à
Paris. Puis j’ai voulu suivre une formation de haut niveau. Après mes études de
physique à l’Université de la Réunion, j’ai donc intégré l’école des Beaux
Arts de Kalakshetra, à Chennai en Inde.J’ai été formée par plusieurs
professeurs à Kalakshetra, et ils ont tous été des modèles pour moi. Lors des
représentations durant le « Kalakshetra dance festival », j’ai eu le privilège
de danser sous la tutelle de maîtres éminents : Mme Krishnaveni Lakshmanan et
Mme Vijayalakshmi qui ne sont plus de ce monde, M Janardhanan qui est un des
piliers de Kalakshetra. Pour la partie technique, c’est Mme Jyolshana puis M. Sheejith Krishna qui me formèrent.
Pour la partie théorique, ce fut M. Janardhanan et M. Narendran qui est très connu à la Réunion.
J'ai toujours admiré les talents d'expressivité de M. Balagopalan.
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IR : Parlez-nous un peu du Kalakshetra, son ambiance, son
organisation, la place qu'il occupe dans le monde de la danse indienne...
KR : L’école Kalakshetra est la référence en matière de
Bharata Natyam. Elle a été fondée par Rukmini Devi qui a sauvé cet art de
l’oubli en 1936.
Des formations professionnelles y sont dispensées en chant et
musique carnatique, en Bharata Natyam et en arts plastiques.
La formation en Bharata Natyam se base sur l’apprentissage
des aspects pratiques et théoriques de cet art, l’apprentissage du chant
carnatique, l’apprentissage des langues indiennes (tamoul, sanscrit) et celui du
yoga.
Je me souviendrai toujours de cette émotion unique et divine
qu’on ressent dans l’auditorium de Kalakshetra, ces efforts et cet acharnement
pour atteindre la perfection.
Ce sont des années de dur labeur, mais elles valent la peine.
KR : A la suite de ma formation à Kalakshetra, j’ai voulu
m’installer à New Delhi car les opportunités à la Réunion n’étaient pas
comparables à celles que je pouvais connaître en Inde. J’ai pu travailler avec
des artistes d’origines et de styles différents. J’ai enseigné la danse à
l’école française de New Delhi dans le cadre des projets PAC. J’ai réussi à
mettre à profit le côté expressif du Bharata Natyam en donnant des cours
d’expression corporelle à la Dramatic Art Academy de New Delhi. Enfin j’ai pu me
produire fréquemment pour des ONG et des organisations diplomatiques lors de
manifestations culturelles.
New Delhi est une grande capitale dynamique et cosmopolite
ayant un passé historique et culturel fascinant. Je ne me lassais pas de visiter
les musées, les galeries et d’assister aux spectacles d’artistes internationaux.
Ce fut une expérience complémentaire à celle que j'ai vécu à Chennai.
KR : Actuellement je donne des cours de Bharata Natyam pour
enfants le mercredi et des cours pour adultes le jeudi à Etang-Salé.
A vrai dire, j’ai eu beaucoup de mal à trouver du soutien de
la part des organisations locales depuis mon retour en 2003. Je me suis produite
à Maurice, en Allemagne, en Inde, en France et à Madagascar, pourtant il m’a été
très difficile de me produire localement.
Je me suis produite récemment à la Villa du département dans
le cadre du Nouvel An tamoul.
KR : C’est une expérience différente de celle qu’on peut vivre
lorsqu’on se produit à la Réunion, car là-bas les gens sont plus exigeants.
KR : Je ne peux m’en séparer car j’y ai baigné depuis l’âge de
six
ans. C’est ma passion.
A l’origine le Bharata Natyam fut une révélation divine.
Cette danse a donc un caractère sacré.
KR : Il n'y a aucun mal à ce que les pratiques se diversifient. Ce
que je remarque surtout depuis mon retour c’est que le Bollywood et le Kollywood
sont visiblement à la mode à la Réunion. Je remarque également que beaucoup de
danseurs et danseuses présentent du Bollywood et du Kollywood en disant que
c’est du Bharata Natyam. C’est surtout cela qui me choque ! Enfin j'entends
parfois des artistes locaux proclamer qu'ils ont été formés à Kalakshetra alors
qu'ils n'y ont jamais mis les pieds ! Heureusement le ridicule ne tue pas...
KR : Je laisse aux spectateurs réunionnais le soin de juger de la
qualité des spectacles proposés et je m‘abstiendrai de tout commentaire.
KR : De bien choisir son style de danse et son professeur. Et je
leur citerai les mots de Rukmini Devi :"Pour apprécier l'art, il faut d'abord
apprécier la création autour de soi. Il n'y a pas d'expression artistique sans
appréciation. Pour être un artiste, il faut apprécier et enfin exprimer ou
créer."
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IR : Si, en tant que danseuse, on vous permettait de réaliser
votre plus grand rêve, quel serait-il ?
KR : Je n’ai jamais rêvé, je préfère l’action. Je suis une femme
de terrain.
KR : Me produire plus fréquemment localement, malgré les
difficultés rencontrées, et me produire à l’étranger. Cela me manque depuis mon
retour à la Réunion.
Je n’exclus pas la possibilité de repartir à l’étranger si
les difficultés persistent.
KR : J’ai décidé de mettre en ligne un site sur le Bharata Natyam
car j’ai remarqué qu’il y avait très peu de sites en français sur le sujet.
C’est une première ébauche et je compte l’étoffer dans les années à venir.Voici
l'URL
http://monsite.orange.fr/bharatanatyam
Je remercie les Indes réunionnaises de m’avoir accordé cet
entretien.
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