|
Ravi Udhandan Govender est né le
10 avril 1966 dans le Kwazulu-Natal, comme la petite fille du Mahatma
Gandhi, Mme Ela Gandhi,
qu’il a accompagnée à la Réunion à l’occasion du 137ème
anniversaire de la naissance du Mahatma. Tous deux ont été invités par
les associations « Oubli pa nout tradisyon tamoule » dont le Président
est Jean-Luc Singaïnyde
Saint-Gilles-les-Hauts, et « Maha badhra Kali » représentée par Julien
Ramin de Saint Pierre ainsi que le « Comité pour la coopération » créé
par Alain Mardaye du Portail.
Dans ses conférences, Mme Gandhi a développé trois points
importants concernant la philosophie de son grand-père qu’elle
attribue d’ailleurs surtout à sa grand-mère, l’épouse du Mahatma,
disant que Mohandas Gandhi, jeune, était possessif et jaloux et
interdisait à sa femme de voir qui elle voulait. Elle aurait toujours
résisté à cette forme de domination et d’après sa petite fille serait
plus encore que son mari, à l’origine de la résistance passive aussi
bien qu’ active, images de proue de la philosophie de M. Gandhi.
Le premier point développé
concernait la diversité dans la tolérance allant de la tolérance du
phénotype, l’aspect physique, jusqu’à la tolérance culturelle et
religieuse. « Mais cette tolérance-là ressemble à accepter l’autre
sans aucune joie », dit-elle. Le deuxième point ajoutait que la
tolérance devait être liée au respect. Et le troisième point soulevait
l’idée de faire la différence entre ce qui est tolérable et ce qui ne
l’est pas.
« Tolerance must go with respect.
We should distinguate what is just and what is unjust. Nevertheless, we
have to discriminate what we tolerate and what we can’t tolerate. » |

Ravi Govender et Ela Gandhi devant
la Chapelle Pointue. |
|
|
|
Les racines de Ravi Govender se trouvent au
Tamil Nadu. Ses grands parents se sont installés en Afrique du Sud vers
1860, mais ce qui compte le plus pour lui, c’est le Kwazulu-Natal, son
pays, dit-il.
Il a commencé à dessiner à l’âge de trois ou
quatre ans : « Maman m’avait donné une feuille de papier, un crayon et un
magazine, ‘Farmers weekly’. Ce magazine contient beaucoup de photos
d’animaux. Je ne pense pas que Maman imaginait que j’allais copier les
écritures plutôt que les images. Elle devait s’attendre à ce que je
dessine… Quand elle est revenue, j’avais reproduit un animal, si bien que
Maman a cru que je l’avais décalqué (I drew it and she thought I traced it)
; elle doute de moi, toujours aujourd’hui encore, d’ailleurs. N’en croyant
pas ses yeux, elle m’a demandé de le refaire devant elle, et je lui ai
répondu qu’on ne pouvait pas refaire deux fois le même dessin. À l’âge que
j’avais, je lui ai répondu ça. C’est sûrement pour cette raison qu’elle ne
me croit toujours pas aujourd’hui. ‘Farmers weekly’ proposait beaucoup de
photos d’animaux, j’avais néanmoins une préférence pour les chevaux. »
Ensuite, dès l’école primaire, R. Govender
s’est tourné plutôt vers la peinture que vers le dessin. Puis il a mené
plusieurs cycles d’études, dont un cycle d’arts avec un spécialiste des
temples hindous, Tom Matthew qui appréciait vraiment son travail, dit-il,
comme étant celui d’un artiste accompli.
« He commited a suicide and I
missed him a lot. » Il a étudié aussi
puis enseigné l’anglais et l’afrikaans. |
|
|

R. Govender réalisant "fusion"
dans la Chapelle Pointue. (Gouache sur textile 45 X 40)
|
|
Ravi Govender peint des symboles religieux sur
des ciels nuageux, des atmosphères lourdes, chargées. Des tridents (trisoula)
de la trinité hindoue (trimurti), des silhouettes diaphanes
méconnaissables, au premier plan des toiles, comme pour malgré leur
anonymat, bien marquer leur présence. La beauté des paysages sud-africains
et une forte sensibilité spirituelle lui inspirent ses productions
picturales qui portent d’ailleurs souvent le nom de « spiritual landscapes ».
Jean Barbier, conservateur du Musée Villèle, et
son équipe ont présenté treize œuvres de l’artiste, de format 45 x 40 cm
environ, dans la Chapelle Pointue située à Saint-Gilles-les-Hauts, sur
l’ancienne propriété de Mme Desbassayns. Ils ont partagé les toiles en
deux parties : l’aile Ouest présentait les toiles aux dominantes de bleu,
jaune et dérivés, celle de droite, l’aile Est était celle des toiles aux
dominante de bleu, de rouge et tons dérivés plus chauds…
Ce samedi 7 octobre 2006, R. Govender a réalisé
dans cette chapelle pour la première fois une peinture sur toile.
« It’s the first time, I paint in
a catholic church. » Quand je lui ai
demandé quel titre il pensait donner à sa toile, il m’a répondu : «Why not
‘ fusion ‘ like the Reunion’s mixed society ? » Cette production était
plus colorée que ses treize toiles exposées autour de lui. Il pense que
les couleurs du chariot malbar (tèl) de la Chapelle La Misère de la
veille, lors de la procession en l’honneur de Gandhi, lui ont inspiré
cette nouvelle réalisation polychrome. Jean Barbier trouve quelque
similitude entre les fleurs placées sous la stèle de Saint Michel, dans la
chapelle, et cette nouvelle toile.
|
|
|
|
« It doesn’t matter to paint in a
catholic church. What is important is to communicate with the divin, I
feel spirits everywhere here around us. » précise l’artiste.
Au cours d’une pause, il m’a montré une des
photos réalisées la veille dans cette chapelle, sur son appareil
numérique. On voyait un homme baigné d’une lumière blanche, éblouissante,
comme un fantôme surgi de nulle part. Le « fantôme » se tenait juste
au-dessus de la plaque de marbre de la tombe de Mme Desbassayns. Et ni
Jean Barbier ni lui-même ne s’expliquaient ce phénomène. La représentation
fortuite de ce fantôme est d’autant plus troublante que la tradition orale
rapporte que lors d’un orage, le marbre du caveau placé sous la chapelle
se serait fêlé et qu’une âme serait passée par cette fissure pour monter
jusqu’au « pointu de la chapelle » et rejoindre les diables de l’Enfer du
Piton de la Fournaise, le volcan réunionnais, actuellement très actif.
R. Govender est déjà venu à La Réunion, invité
par le musée Stella Matutina auquel il a offert deux toiles dont un
« spiritual landscape ». Cette fois, à Saint-Gilles-les-Hauts, sa fonction
n’était pas seulement culturelle. Il semble qu’il était là aussi pour
veiller à la sécurité de Mme Ela Gandhi. Il n’était pas pour autant un
« garde du corps »
ordinaire, puisqu’il a participé au cycle de conférences programmé à la
Chapelle La Misère, le samedi 7 octobre 2006 à 17 heures, pour diffuser et
commémorer la philosophie du Mahatma Gandhi, de Martin Luther King et
celle de Nelson Mandela. Son éventail d’actions était bien chargé, à
l’image de la citation de Martin Luther King qu’il a énoncée lors de son
intervention ; « No pain, no gain. »
On peut se dire qu’une conférencière,
philosophe partisane de l’idéologie de son grand-père, à savoir la
tolérance, la résistance au racisme et à l’exploitation, n’a pas besoin de
garde du corps, mais ce serait oublier que le Mahatma Gandhi a été
assassiné le 30 janvier 1948, qui plus est par un hindou…
Ce dimanche matin, 8 octobre 2006, Ravi
Govender a vérifié les alentours de la chapelle pendant que Mme Gandhi
saluait les personnes qui allaient participer avec elle au débat. Il a
fait la même chose avant qu’elle ne quitte la chapelle pour remonter dans
la Mercedes blanche qui devait la conduire à Saint Pierre avec Daniel
Tévanin-Singaïny, le « prèt tamoul », fondateur et servant de la chapelle
la Misère, pour l’inauguration d’une nouvelle stèle à la mémoire du
Mahatma. Pendant l’intervention d’Ela Gandhi, il a photographié à nouveau
les personnes présentes.
R. Govender présente la carte de visite
suivante : « Deputy Manager, Corporate Strategy & Executive Support of
Department of Arts, Culture & Tourism of Kwazulu-Natal.» Il est également
dit-il, l’ancien conservateur du musée de Durban. Même si sa fonction
principale est celle d’attaché culturel dans le gouvernement du
Kwazulu-Natal, collaborateur du Ministre des Arts, de la culture et du
tourisme, on pourrait dire que Ravi Govender représente la version
« non-violente » de la protection rapprochée d’une personnalité, qu’il est
un peintre de la communication avec l’au-delà ainsi qu’un prédicateur de
la force de l’âme…
L’entretien qu’il a bien voulu m’accorder nous
permet de découvrir la complexité des fonctions d’un artiste qui malgré
son foisonnement est en définitive cohérente. L’artiste met sa peinture au
service de la philosophie de la « non violence » et de la religion, et son
idéalisme au service de la démocratie.
Les échanges entre les personnes qui ont
participé aux conférences d’Ela Gandhi ont fait progresser l’interculturalité
en faisant se rencontrer la non-violence du Mahatma, et le modèle
réunionnais du dialogue des cultures. |
|
ACCUEIL
CHALEUREUX POUR LA PETITE-FILLE DU MAHATMA
Éla Gandhi
salue le métissage culturel réunionnais
Publié dans l'édition du samedi 7 octobre 2006 de « Témoignages »
(page 11)
L’ancienne
parlementaire de l’ANC en Afrique du Sud participe aux côtés de
l’artiste sud-africain Ravi Govender aux manifestations organisées à
La Réunion par plusieurs associations pour célébrer le 137ème
anniversaire de Mahatma Gandhi.
Arrivée hier en
fin d’après-midi à Gillot, Éla Gandhi a été accueillie chaleureusement
par plusieurs dizaines de personnes rassemblées dans la cour de
Jean-Claude Brimbel à la ZAC Foucherolles du Moufia. La conférencière
et petite-fille de “La Grande-âme” (Mahatma) était accompagnée de Ravi
Govender, collaborateur du ministre des Arts, de la culture, de
l’éducation et du tourisme du Kwazulu Natal, conférencier, ancien
conservateur au musée de Durban et artiste peintre.
Les deux
personnalités sud-africaines ont été saluées par les représentants des
trois associations qui ont organisé leur venue à La Réunion : Alain
Mardaye pour le Comité pour la Coopération, Lupin et Daniel Singainy
pour Obli pa not tradition tamoul Villèle, et Julien Ramin pour Maha
Badra Karly de Saint-Pierre. D’autres Réunionnais leur ont également
souhaité la bienvenue : Henri Chane-Tèf, Vice-président de la
Fédération des associations culturelles chinoises de La Réunion, et
Gino Ponin-Ballom, représentant du Conseil général.
Pour une
société harmonieuse
Tous ces
Réunionnais ont rendu hommage au combat de Gandhi pour la liberté et
contre toutes les injustices. Ils ont souhaité que notre île s’inspire
toujours davantage de sa philosophie en construisant une société
harmonieuse et solidaire, bannissant toutes les formes d’inégalités et
de communautarismes.
Éla Gandhi a
exprimé son bonheur d’être à La Réunion. Elle s’est présentée avant
tout comme une militante au service des idées de son grand-père.
"En effet,
dit-elle,
quand on
voit toutes ces violences dans le monde actuel, on se rend compte que
l’humanité est menacée".
C’est pourquoi la militante des droits humains se bat pour promouvoir
partout les grands principes de Gandhi, comme la “Satyagraha”
(non-violence). Ce sera d’ailleurs l’un des thèmes de ses conférences.
La militante politique - depuis l’âge de 12 ans, elle a combattu le
régime de l’apartheid dans son pays - a également prôné le respect de
la diversité culturelle dans le monde et la recherche de l’unité. Dans
cet esprit, elle a salué
"le
métissage culturel réunionnais, qui peut servir d’exemple dans le
monde".
L. B.
Rappel du
programme
o Samedi
7 octobre :
- 7 heures :
Installation du peintre Ravi Govender et exposition.
- 17 heures 30 :
Conférence débat par Éla Gandhi et Ravi Govender sur “Gandhi’s idea of
Satyagraha” et “Gandhi and Martin Luther King the champions of non
violence” à la Chapelle la Misère de Villèle. Traduction française
assurée.
o Dimanche 8
octobre
- 7 heures 45 :
Ouverture par Éla Gandhi de la conférence-débat sur la tolérance, avec
des intervenants réunionnais.
- 9 heures 30 :
Inauguration de la stèle de Mahatma Gandhi à Saint-Pierre
(intersection des rues Mahatma Gandhi et Albert Luthuli).
- 18 heures :
spectacle Mélanz Nation à Villèle.
o Lundi 9
octobre
- 15 heures :
Exposition de Ravi Govender au Conservatoire national de région (CNR)
à Saint-Pierre.
- 17 heures 30 :
Conférence-débat avec Éla Gandhi et Ravi Govender au CNR de
Saint-Pierre sur “Gandhi’s idea of Satyagraha” et “Gandhi and Martin
Luther King the champions of non violence”.
|