Anushka Ravishankar

" I’m a huge fan of Lewis Carroll’s nonsense"

    
  
   Déjà connue en France depuis sa participation à l'opération "Les Belles Étrangères" consacrée à la littérature indienne en 2002, Anushka Ravishankar est l'auteur de livres de littérature enfantine dont certains ont déjà été traduits et publiés en français. Elle répond ici à quelques questions destinées à faire plus ample connaissance avec son oeuvre.

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Interview

  • IR : Anushka Ravishankar, please could you first introduce yourself to our visitors ?
          Anushka Ravishankar, pouvez-vous d'abord vous présenter à nos visiteurs ?

    AR : I’m a writer based in Chennai, India. I write books for children and plays for adults and children. I write in English.

      
    Je suis écrivain, je réside à Chennai, en Inde. J’écris des livres pour enfants et des pièces de théâtre pour adultes et enfants, en anglais.


  • IR : When and how did you start to write ? And why did you choose literature for children ?
           Quand et comment avez-vous commencé à écrire ? Et pourquoi avoir choisi la littérature enfantine ?


    AR : I started writing stories for children when my daughter was around four years old, mainly because I found there was a need for more Indian material for children. Then when I moved to Chennai in 1996 I started working with Tara Publishing, and started writing books for children. I soon found that it was what I liked doing best.

      
    J’ai commencé à écrire des histoires pour enfants lorsque ma fille avait environ quatre ans, principalement parce que je trouvais que la littérature enfantine en Inde manquait un peu de richesse. Puis, lorsque je me suis installée à Chennai en 1996, j’ai commencé à travailler avec les Éditions Tara, et j’ai commencé à écrire des livres pour enfants. J’ai vite compris que c’est ce que je préférais faire.

     
  • IR : Why not to write for adult readers ? Is not there something frustrating sometimes, even though we can easily understand literature for children is also gratifying somehow ?
         Pourquoi ne pas écrire pour les adultes ? N'y a-t-il pas parfois quelque chose de frustrant, même s'il est facile de comprendre que la littérature enfantine a elle aussi ses côtés gratifiants ?

    AR : I don’t find it frustrating, because I have a lot of fun writing the kind of books I write. I wouldn’t mind writing for adult readers, but I haven’t really got round to it. Of course, I do write plays for adults. Besides, a lot of adults have confessed to enjoying my nonsense verse, so maybe there isn’t as clear a distinction between children and adult readers as one thinks there is.

       Je ne trouve pas du tout la chose frustrante, parce que je prends beaucoup de plaisir à écrire ce genre de livres. Cela ne me dérangerait pas d’écrire pour des lecteurs adultes, mais je n’y arrive tout simplement pas. Bien sûr, j’écris des pièces pour adultes. Du reste, beaucoup d’adultes ont avoué qu’ils prenaient plaisir à mes vers fondés sur le non-sens, il n’y a donc peut-être pas de distinction nette entre lecteurs enfants ou adultes, contrairement à ce que l’on pense.


  • IR How could you define the style of the books you write ?
          Comment définiriez-vous le style de livres que vous écrivez ?

    AR : I’ve written many kinds of books, but most of my books are picture books with nonsense verse or absurd verse.

      
    J’ai écrit toutes sortes de livres, mais la plupart d’entre eux sont des livres illustrés dont les textes sont des vers fondés sur le non-sens ou l’absurde.


  • IR : According to you, why this special taste for nonsense ?
         Selon vous, pourquoi ce goût particulier pour le non-sens ?

    AR : I’m a huge fan of Lewis Carroll’s nonsense. Like Carroll, I studied Mathematics, so I have a special affinity for logic and by extension, for illogical nonsense. Nonsense lets you jump out of the boundaries of language and logic. I like playing with words and ideas, with their sounds and their meanings. I enjoy absurdity, I like rhyming, so writing nonsense verse seems like the perfect thing to do.

      
    Je suis une grande fan du non-sens pratiqué par Lewis Carroll. Comme Carroll, j’ai étudié les mathématiques, je me sens donc très attirée par la logique, et par extension par le non-sens illogique. Le non-sens vous entraîne d’un bond hors des limites du langage et de la logique. J’aime jouer avec les mots et les idées, avec les sons et les sens. Je prends plaisir à l’absurdité, j’aime rimer : aussi écrire des vers fondés sur le non-sens correspond à ce qui me convient forcément le mieux.


  • IR : And what about your collaboration with some illustrators ?
          Que direz-vous de votre collaboration avec des illustrateurs ?

    AR : That’s one of the most exciting aspects of my work. Each of my collaborations has been different from the other. I’ve worked the conventional way – words followed by pictures, but I’ve quite often worked backwards, from the pictures to the words; or sometimes it goes back and forth. The tension between the words and the pictures is what makes a picture book really work. So I like working with illustrators who don’t stick too close to the text, but add their own little visual stories, as Piet Grobler has done in Today Is My Day.  If you can’t understand the text completely without the visuals and you can’t enjoy the visuals completely without the text, then you know you’ve managed to strike the perfect balance of text and pictures.

      
    C’est un des aspects les plus enthousiasmants de mon travail. Chacune de mes collaborations a été une expérience différente. Il m’est arrivé de travailler de manière conventionnelle – le texte suivi des images – mais j’ai très souvent travaillé à rebours, en partant des images pour aller vers les mots ; ou bien encore il arrive que le mouvement se fasse dans les deux sens. C’est la tension entre mots et images qui fait qu’un livre d’image fonctionne vraiment. C’est pour cela que j’aime travailler avec des illustrateurs qui ne se tiennent pas trop près du texte, mais qui apportent leurs propres petites histoires visuelles, comme Piet Grobler l’a fait dans Today is my day (« C’est aujourd’hui mon jour »). S’il n’est pas possible de comprendre complètement sans les images et s’il n’est pas possible d’apprécier complètement les images sans le texte, alors c’est la preuve que le parfait équilibre entre texte et illustrations a été trouvé.


  • IR : Is literature for children an old tradition in India ? What could you say about it ?
         La littérature enfantine est-elle une vieille tradition en Inde ? u'avez-vous à en dire ?

    AR : Not really. India is a country with strong oral traditions. Stories from the old epics were narrated and performed in public spaces, and these performances were attended by adults and children. The old folk traditions also included strong visual narrative forms. But none of these were targeted solely at children. They were meant for adults as well. But children’s literature has become a popular genre in some parts of India now. The Indian states of Bengal, Kerala and Maharashtra have some good children’s literature in their own languages (Bengali, Malayalam and Marathi, respectively). But apart from these, the children’s book market in India is still quite nascent.

      
    Pas vraiment. L’Inde est un pays de fortes traditions orales. Des récits tirés des vieilles épopées étaient racontés et représentés dans des lieux publics, et adultes comme enfants assistaient à ces représentations. Les vieilles traditions populaires comportaient aussi des formes narratives à forte dimension visuelle. Mais rien de tout cela ne ciblait spécifiquement les enfants. Les adultes étaient concernés au même degré. Mais à présent la littérature enfantine est devenu un genre à succès dans certaines parties de l’Inde. Les états du Bengale, du Kerala et du Maharastra possèdent une bonne littérature pour enfants dans les langues locales (respectivement le bengali, le malayalam et le marathe). Mais en dehors de ces régions, le marché de la littérature enfantine en Inde est encore à l’état naissant.


 

  • IR : Do you consider yourself as a typically Indian writer ? Has Indian culture any particular influence on the things you write or on the way you write ?
         Vous considérez-vous comme un écrivain typiquement indien ? La culture indienne a-t-elle une influence particulière sur ce que vous écrivez ou sur la manière dont vous écrivez ?

    AR : I don’t set out to write ‘Indian’ books. I write in English, primarily for an urban, English-educated reader, not because I want to write only for such a reader, but because that is a position I have to live with. I’m not sufficiently literate in any of the Indian languages, so I have to write in English, which straightaway defines my readership. And yet, some of my books are quite distinctly Indian – Tiger on a Tree and  Catch That Crocodile could not have been set anywhere but in rural and semi-urban India, for instance. All my books are not so rooted, however. Wish You Were Here, a book about a family of oddballs, defies context. But then, whatever I write, I write as an Indian of my time and place. So I don’t bother too much about whether or not I’m being ‘Indian’ in my writing.

      
    Je ne cherche pas spécifiquement à écrire des livres « indiens ». J’écris en anglais, d’abord pour un lectorat urbain et d’éducation anglophone, non pas parce que ce serait ma volonté d’écrire seulement pour un tel lectorat, mais parce que c’est une situation avec laquelle je dois faire. Je n’ai la maîtrise suffisante d’aucune langue indienne, et je dois donc écrire en anglais, ce qui détermine automatiquement mon lectorat. Et cependant certains de mes livres ont une indianité évidente – Tiger in the Tree (Où est Petit-Tigre ?) et Catch that Crocodile (Attrape le crocodile) n’auraient pas pu se dérouler ailleurs que dans l’Inde rurale ou semi urbaine, par exemple. Cependant tous mes livres ne sont pas forcément enracinés dans le terroir indien. Wish You Were Here (« Si tu pouvais être là »), un livre sur une famille d’excentriques, ne s’inscrit dans aucun cadre particulier. Mais quoi que j’écrive, j’écris en tant qu’Indienne, une Indienne de son époque et de son pays. Si bien que je me soucie peu de savoir si je suis ou si je ne suis pas « indienne » dans mon écriture.


  • IR : Some of your books have been translated into French. Did you get any reaction from your French readers ?
         Certains de vos livres ont été traduits en français ; avez-vous connaissance de réactions de la part de vos lecteurs français ?

    AR : Tiger on a Tree and  Catch That Crocodile  have been published by Editions Syros in France. I spent two weeks in France in 2002, meeting children and teachers in schools and libraries. It was a delightful experience. The children were very enthusiastic about the books. The illustrator of Tiger and Crocodile, Pulak Biswas, was also there, and he was a great hit with the children, because he drew tigers, crocodiles and elephants for them! They had all kinds of questions about the books, and about India, which Pulak and I enjoyed answering. I was especially struck at the creative ways in which the teachers used the books in their teaching.

      
    Tiger in the Tree (Où est Petit-Tigre ?) et Catch that Crocodile (Attrape le crocodile) ont été publiés par les Éditions Syros en France. J’ai passé deux semaines en France en 2002 ; j’y ai rencontré des enfants et des enseignants, dans des écoles et des bibliothèques. Ce fut une expérience délicieuse. Les enfants ont manifesté beaucoup d’enthousiasme pour les livres. Paul Biswas, l’illustrateur du Tigre et du Crocodile, était présent lui aussi, et il a eu un gros succès auprès des enfants, parce qu’il leur dessinait des tigres, des crocodiles et des éléphants ! Ils ont posé des quantités de questions sur les livres, mais aussi sur l’Inde, et Pulak et moi avons pris plaisir à répondre. J’ai particulièrement été frappée par l’inventivité dont font preuve les enseignants dans leur utilisation pédagogique des livres.


  • IR : And what about your experience of writing for theatre ?
          Qu'avez-vous à dire de votre expérience dans le domaine de l'écriture théâtrale ?

    AR : I’ve written a few plays for adults and several musicals for children. Five of my plays for adults – some short and some long - have been performed so far in Chennai, Delhi, Bangalore, London and Sao Paulo. The children’s plays have been performed mainly in schools.

      
    J’ai écrit quelques pièces de théâtre pour adultes et plusieurs pièces musicales pour enfants. Cinq de mes pièces pour adultes – courtes ou longues – ont déjà été représentées, à Chennai, Delhi, Bangalore, Londres et Sao Paulo. Les pièces pour enfants ont principalement été représentées dans des écoles.


  • IR : Today, what are your projects ? Did you ever think of coming to Reunion Island to talk about your books and meet people ? Do you know about Indian culture and people of Indian descent in this island ?
          Aujourd'hui, quels sont vos projets ? Avez-vous envisagé de venir à la Réunion pour parler de vos livres et rencontrer des gens ? Savez-vous quelque chose de la culture indienne et de la population d'origine indienne dans cette île ?

    AR : I have a few books coming out soon, published by Puffin India. I’ve written three more books for Tara which need to be illustrated, and might come out in the next year. I have a few more writing projects with Puffin and with Tara in the coming year.
       I would love to come to the Reunion Islands, if I could find the funding. I’m afraid I don’t know enough about the people of Indian descent there, though I have read a little about Reunion Islands and about its people.

       Je vais prochainement publier chez Puffin India quelques nouveaux livres. J’ai écrit trois autres livres pour tara, qui sont en attente d’illustration et qui pourraient paraître l’année prochaine. J’ai quelques autres projets d’écriture avec Puffin et Tara pour l’année à venir.
       J’adorerais venir à la Réunion, si je pouvais en trouver les moyens financiers. Je crains de ne connaître que fort peu sur les descendants d’Indiens qui vivent là-bas, bien que j’aie fait quelques lectures sur la réunion et ses habitants.

 

 

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