Interview
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IR/LNRI: Anurag
Kashyap, your movie Gangs Of Wasseypur will be soon on screen in
France: is it important for you that French people acclaim this film?
Anurag Kashyap, votre film Gangs Of Wasseypur sera bientôt
sur les écrans en France : est-l important pour vous que ce film
rencontre le succès auprès du public français ?
AK: It’s important for me to find new audience.
It’s important that my film goes wider and it’s often seen that when a
film is accepted in France, the rest of Europe follows. I am a
filmmaker, I want to reach out as far as I can, this gives me
sustainability and allows me to make more films and also puts me in a
position to produce more.
France is one of the key markets other than North
America and Japan. And Indian films have had a very minimal presence
there. If we change that, it also strengthens our future.
Il est
important pour moi de trouver un nouveau public. Il est important que
l’audience de mon film s’élargisse et il s’avère que quand un film est
bien reçu en France, le reste de l’Europe suit. Je réalise des films, je
veux toucher le plus de monde possible, cela consolide mes perspectives
et me donne la possibilité de continuer à faire des films et d’en
produire davantage.
Avec l’Amérique du Nord et le Japon, la France est un marché
essentiel. Et les films indiens y sont très peu présents. Si nous
arrivons à changer cette situation, cela nous rendra plus forts.
AK: Yes , very much. We did not expect such a strong
and positive reaction. We were scared because of the length of the film,
also because it had music, a lot of it. But that one day at the Director's
Fortnight and the reviews that followed, changed everything. Overnight we
went from being a suspect film to a celebrated film. It helped with our wide
Indian release too. And I thank Edouard Waintrop for believing in it so
much.
Oui, très heureux. Nous ne nous attendions pas à une
reaction si forte et si positive. La longueur du film nous faisait
peur, ainsi que la présence abondante de la musique. Mais tout a changé le
jour de la projection dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs, et
avec les critiques qui ont suivi. Ce soir-là, le film est passé du statut de
celui qui suscite la méfiance à celui qui suscite les louanges. Cela nous a
aussi aidé pour la sortie en Inde. Et je tiens à remercier Edouard Waintrop
pour y avoir cru si fort.
AK: No it does not mean that I expect it to be a
blockbuster. I mean it will have the maximum reach of all my films so far.
Which it has got.
Non, ce
n’est pas ce que j’attends. Ce que je veux dire, c’est que ce film est conçu
pour toucher un public beaucoup plus large que mes réalisations précédentes.
Et c’est ce qui se passe.
De toute
façon vous n’avez pas réalisé ce film en prenant toutes les garanties pour
qu’il devienne un film à large succès commercial en Inde, puisque vous avez
en quelque sorte défié la censure… Est-ce que Gangs Of Wasseypur est
vraiment un défi ?
AK: In a way yes it is a challenge, because it
challenges the way we make films or have made them so far. And in a way no,
it’s not really a challenge because it does not take the risk like Black
Friday to stick to absolute truth and not change names and not use
cushioning of music and all that was a choice. I don’t think one can really
make a Black Friday again in this country, because our government has
become more conservative than it was in last five years. And there was only
two ways to make Gangs of Wasseypur, either I did it the Black
Friday way and stick to absolute facts, even if they were mundane and
boring, devoid of any heroism and risk ban and court cases and never having
it released or camouflage it, alter it, cheat a little and have it out
there.
D’une certaine façon, oui, c’est un défi, dans
la mesure où il va à l’encontre de la manière dont nous avons, ou avions
jusqu’ici, coutume de faire des films. D’un autre point de vue, non. Ce
n’est pas vraiment un défi parce que je ne prends pas les mêmes risques
qu’avec Black Friday, où je m’en tenais étroitement à la pure
réalité, où les noms réels étaient conservés, où la musique venait arrondir
les angles… tout cela par choix. Je ne crois pas que quiconque soit
aujourd’hui en mesure de faire à nouveau un film comme Black Friday
en Inde : notre gouvernement est maintenant plus conservateur qu’il de
l’était il y a cinq ans. Alors il n’y avait que deux manières de concevoir
Gangs Of Wasseypur : soit à la manière de Black Friday, en
m’en tenant strictement aux faits réels, aussi banals et ennuyeux
soient-ils, totalement dénués d’héroïsme, et alors je prenais le risque de
l’interdiction et des procès, le risque que le film n’aboutisse jamais, ou
alors je devais prendre l’option de travestir, modifier, tricher un peu,
pour être sûr qu’il puisse aboutir.
IR/LNRI:
For you, is violence in your movies a way to
denounce social dysfunction, to crudely show reality, to attract a certain
audience, what
else...?
Pour vous, la violence dans vos
films est-elle façon de denoncer un dysfonctionnement social, de montrer
crûment la réalité, d’attirer un certain public, ou quoi d’autre… ?
AK: Violence for me is out there and I want to
thrust it in people's faces because for long they have chosen to look away
and applaud at fake heroism and flying heroes. Violence for me is just that
Violence and it serves the purpose, it violates the audience.
Pour moi,
la violence est juste là, et je veux la jeter à la face des gens, parce que
depuis trop longtemps ils ont choisi de détourner le regard, d’applaudir à
un héroïsme et à des héros de pacotille. Pour moi, la violence n’est que ce
qu’elle est : de la Violence, et cela sert mes objectifs, cela fait violence
au public.
AK: For me it’s not just Mafia. When you see the
entire five hours, you will see in many ways it’s also a social study of a
place over time. And Crime does fascinate me, it always has.
Pour moi,
le sujet ne se limite pas à la mafia. Lorsqu’on regarde l’intégralité des
cinq heures du film, on voit que, par bien des aspects, c’est l’étude
sociale d’un lieu à travers les époques. Mais par ailleurs oui, le Crime me
fascine, il m’a toujours fasciné.
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IR/LNRI:
In
its general conception and design, is this movie really different from any
mainstream Bollywood movie?
Dans sa conception générale, son esthétique, le film est-il au
fond très différent des productions typiques de Bollywood ?
AK: Yes. The film references Bollywood and Bollywood
is a character in the film. It’s a culture and an influence in the film. The
film shows affectations of it vis a vis the people in that world.
Oui. Le
film fait référence à Bollywood et Bollywood est un personnage du film. Il y
a dans le film une culture et une influence bollywoodiennes. Il montre les
effets de Bollywood sur les gens dans ce monde-là.
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IR/LNRI:
When people
compare you with Tarantino, Coppola, Scorsese, Leone..., does it rile you?
Would you not prefer that they notice your own distinctive artistic
features?
Lorsqu’on vous compare à Tarantino, Coppola, Scorsese, Leone..., cela vous
agace-t-il ? Ne préfèreriez-vous pas que l’on mette plutôt en avant votre
propre originalité artistique ?
AK:
I hope they notice what I do. I cannot deny how
deeply Scorsese affects me, but with this film we did not refer to anything
Hollywood or even European. So yes those comparisons do sometimes rile me.
J’espère
que les gens se rendent vraiment compte de ce que je fais. Je ne peux nier
l’impact profond de Scorsese sur moi, mais avec ce film, nous n’avons fait
aucune référence à Hollywood ou au cinéma européen. Donc oui, ces
comparaisons m’agacent parfois.
Quels
sont les réalisateurs indiens (anciens ou actuels) que vous admirez le
plus ? Pourquoi eux ?
AK: Guru Dutt, Bimal Roy then and Dibakar Bannerji,
Vishal Bharadwaj now. In Tamil it’s Bala, Vetrimaran, Sasi Kumar, Ameer
Sultan, Selva Raghavan etc. I cannot really articulate why I admire them.
Guru Dutt, Bimal Roy, puis Dibakar Bannerji, Vishal
Bharadwaj aujourd’hui. Parmi les Tamouls : Bala, Vetrimaran, Sasi
Kumar, Ameer Sultan, Selva Raghavan etc. Difficile d’expliquer clairement
pourquoi je les admire.
Pensez-vous
que le cinéma indien sera enfin bientôt largement apprécié par les
Occidentaux ?
AK: I again hope so. I hope they see Indian films in
their own context like they see the Chinese martial art films or the Korean
films.
Je l’espère. J’espère qu’ils considèreront ce
cinémo indien en function de son contexte spécifique, comme ils le font pour
les films d’arts martiaux chinois ou les films coréens.
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IR/LNRI:
Can you say
anything about your next movies, Bombay Velvet, Doga, Minto, Ugly?
Pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet de vos prochains films, Bombay Velvet, Doga, Minto, Ugly ?
AK: Ugly is what I start next. It’s a genre film, a
kidnap drama. Bombay Velvet is loosely inspired from Gyan Prakash's
book Mumbai Fables and also co written by him. It’s the story of
Bombay before it became Mumbai. It again deals with Crime but also deals
with Jazz that briefly existed in the 60's in the city. It stars Ranbir
Kapoor, Anushka Sharma and Naseeruddin Shah. Rest it’s too early to talk
about.
Ugly
est le prochain à être programmé. C’est un film de genre, sur un kidnapping.
Bombay Velvet est librement inspiré du livre de Gyan Prakash, Mumbai Fables ; Prakash est d’ailleurs aussi coscénariste. C’est
l’histoire de Bombay, avant sa transformation en Mumbai. Il sera à nouveau
question de crime, mais aussi de jazz, puisque cette musique a connu une
mode éphémère à Bombay dans les années 60. Ranbir Kapoor, Anushka Sharma et
Naseeruddin Shah sont en tête d’affiche. Il est trop tôt pour parler des
autres films.
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