Interview exclusive :
Robert Labor
    
  
Robert LABOR, c’est 40 années de création, de réflexion sur l’art à travers la peinture, la sculpture. Enseignant en arts plastiques, diplômé de Claude Bernard à Paris, il débute la peinture à l’âge de 17 ans à la REUNION. Né le 13 mai 1937 à Saint-Denis de la Réunion, études secondaires au Lycée Leconte de Lisle à Saint-Denis, vient en France en1959 et après une incursion dans les études de mathématiques se laisse porter par sa passion pour l’art - questionnement qui a dirigé toute sa vie.

Interview      Trois tableaux : la marche dans le feu


Interview

  • IR : Robert Labor, pouvez-vous vous présenter aux visiteurs du site Indes réunionnaises ?

    RL : Labor est mon nom d'Artiste. J'ai 64 ans. Je suis un Créole blanc aux yeux bleus (quoique métissé du côté de mon père, Créole brun avec un métissage certain, blanc-noir-indien... je n'ai pu trouver l'origine exacte...).
    Ayant déja une solide expérience de la création artistique, j’ai préparé mes examens de professeur d’arts plastiques tout en travaillant pour gagner ma vie : cours du soir aux Beaux-Arts de Lyon, écoles d’arts de Lyon... et par le centre de télé-enseignement, pour la partie théorique (esthétique, histoire de l’art, sciences et techniques du dessin, perspectives etc.. ) le professorat se préparant par certificats, et sur concours. Professeur certifié de dessin et arts plastiques, nommé agrégé en 1997.
    De 1970 aux années '80, cubiste, cubiste-expressionniste, constructiviste, de découverte en découverte... arrive à l’ élaboration d’un art métis (sampling) dans les années 1980-90, faisant dialoguer les œuvres et les styles entre eux.
  • IR : Pouvez-vous dire dans ses grandes lignes quelle est votre vision de la peinture ?

    RL
    Je suis en ce moment persuadé que "l'image"dans la création plastique n'a qu'une importance relative, peut-être sert-elle de "medium" pour la communication, une sorte d'explication en quelque sorte. Mais, l'essentiel à mes yeux se trouve dans la"matière"-même de l'œuvre et dans "l'écriture" de l'artiste, deux choses qui sont en somme la signature de sa présence en tant qu'artiste (personnage faisant passer des messages par la "sensation" visuelle en l'occurrence) : la peinture devient ainsi le prolongement de l'homme... physique, mental, spirituel, son mystère propre qui parfois et souvent lui échappe... Il arrive ainsi à sa propre découverte.. .(tout à fait relative, comme le mystère de notre petite humanité). Voici l'explication que je peux donner de ma maniere de peindre "au dessus des nuages"
  • IR : L'île de la Réunion vous a inspiré une série de toiles évoquant la marche dans le feu, cérémonie pratiquée dans la communauté tamoule : pouvez-vous nous retracer la genèse de cette création ?

    RL : Je connais la marche dans le feu depuis ma tendre enfance, mais pas forcément de façon positive. Car dans ma famille, de croyance chrétienne, la religion tamoule était totalement exclue de notre pensée, et autour d’elle se forgeaient maintes superstitions. J’entendais les battements de tambours, à travers les champs de cannes à sucre qui nous séparaient du temple tamoul qui se trouvait "au Chaudron". Moi j’habitais Sainte-Clotilde, juste à côté. Pour remonter très loin, des peurs s'étaient installées en moi et la population indienne nous tenait à l’écart et entretenait ce mystère, pour ne pas être dérangé par des curieux. A l’école déjà, j’ai eu des vrais amis dans la communauté. J’ai appris à les connaître, à les respecter et à respecter leur foi, différente de la mienne, et j’ai toujours eu la conviction que le but, en somme, était le même, nous avions pris seulement des chemins différents.
  • IR : Quelle vision de la marche sur le feu avez-vous souhaité donner ? Pouvez-vous donner quelques précision techniques sur votre travail ?

    RL :
    Mon travail est donc un hommage, hommage à ces hommes et femmes qui sont réunionnais comme moi, nous avons vécu ensemble sous le même tamarinier (le pied de tamarin comme on dit chez nous) et cela fait partie de ma culture. Ma technique est celle de la gouache sur papier. Il y a deux choses importantes, que j’ai voulu mettre en relief dans le choix de mon parti-pris. D'abord une rigueur, la construction de formes, de couleurs qui s’articulent, à dominante carrée, et en même temps, un rythme, une envolée de couleurs vives, blanc, safran, rouge, noir et aussi le bleu chaud du ciel de l’été brûlant, sur la côte et au Chaudron ou la chaleur est touffeur. L’asphalte fume à midi. Rigueur du "carême" bien suivi et abandon de cette rigueur pour la fête, la transe, le don de soi aux rythmes des tam-tam, comme une communion avec les forces dynamiques de l’univers.
    Pourquoi une série ? Les marcheurs sur le feu défilent sur les braises, les pieds nus, comme  envoûtés par la grandeur de leur foi et leurs jours de jeûne. Ils imposent le respect.

  • IR : Quelle place cette série occupe-t-elle dans l'ensemble de votre œuvre ?

    RL : Je ne sais pas trop bien quelle place cette série occupe dans mon œuvre. Je sais que j’ai repris ce thème (l'Inde) différemment dans ma série des femmes, sensuelles, un tableau intitulé  les Indiennes  dans les années 87-89 où le jaune domine… Peut-être aussi dans mes abstractions : j’ai beaucoup lu et aimé Rabindranath Tagore.. Je pense que l’enfance et la culture, font entendre leur voix, là où parfois on ne l’attend pas…

  • IR : Ces cultures indiennes de l'île, que représentent-elles pour vous ? Une simple sujet pittoresque, ou beaucoup plus que cela ?

    RL : Le pittoresque est totalement exclu de ma pensée. Je ne ressens que le rythme des tam-tam, la couleur safran, la couleur blanche de la recherche de pureté et de la noix de coco, la blancheur du lait, la chaleur des brasiers, le rouge sang des sacrifices et des offrandes, le noir du charbon qui brûle ; le sens de la fête et le massalé.

  • IR : Quels sont les grands artistes que vous admirez ? Ceux qui vous semblent exercer une influence sur votre création ?

    RL : Les artistes que j’aime ? Rembrandt, Michel-ange, Le Tintoret, Corot, Matisse ,Cézanne, et Picasso bien sûr pour sa leçon de liberté, et bien d’autres…

  • IR : Où peut-on voir vos œuvres, les acheter éventuellement ?

    RL : Depuis quelques temps, je n’ai pas de galeries. Pourquoi ? Pour maintes raisons... peut-être un peu trop le sens de la liberté ! On peut voir mes œuvres dans mes expositions, sur mon site, dans mon atelier du Tampon et dans mon atelier de Boulbon (en Provence) quand j’y suis.

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Trois tableaux de la série la marche dans le feu

                                       

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