Raghunath MANET :

"l'amour pur qu'enferme l'art, le bonheur qu'il peut apporter à tout le monde"

    
  
   Originaire de Pondichéry, partageant son temps entre la France, l'Inde et les tournées internationales, Raghunath Manet est une des grandes références actuelles de la culture musicale et chorégraphique indienne. En tant que danseur, il pratique aussi bien le Kuchippudi que le Bharata Natyam, style exigeant pour lequel il a été reconnu au plus haut niveau. Son instrument de musique est la vîna, incontournable dans la musique carnatique.
   Raghunath Manet s'est produit sur les scènes les plus prestigieuses, de Paris à Madras, en passant par Rome, Londres, les USA ou l'Australie ; il a collaboré avec de grands noms de l'art musical et de la danse.
   A noter, ce communiqué : "A l'occasion de la sortie du nouveau CD de Raghunath Manet,
Karnatik, avec Dr Balamuralikrishna, la plus grande voix de l'Inde, MK 2 présente Anjali - du temple à l'écran - création musique-danse de l'Inde de Raghunath Manet entouré de danseuses, chanteurs, instrumentistes et de percussionnistes indiens des chorégraphies de temple et de cinéma. Du 23 au 29 mars 2004 à 21 heures au Cinéma MK 2 Grande Bibliothèque. Réservations : Fnac".
   Vous pouvez lire également une autre interview de Raghunath Manet, réalisée lors de l'un de ses passages aux Antilles, sur cette page.

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Interview

  • IR : Raghunath Manet, quels ont été la formation et le parcours que vous avez suivis pour devenir l'artiste de premier plan que vous êtes aujourd'hui ?

    RM : J'ai été avant tout initié à la musique (chant, violon, flûte traversière par mon grand-père Gnanamani Pillai qui fut un grand musicien à Pondichéry. Alors que mes soeurs s'initiaient à la danse, mon intérêt se porta aussi sur la danse ; mes parents me l'avaient interdit car un garçon ne doit apprendre que la musique. Au début, j'imitais les mouvements de mes soeurs dans une chambre, puis j'ai demandé à leur professeur de me l'apprendre sans que mes parents le sachent ; telle fut ma première formation.
       Puis j'ai été attiré par la vîna. Je suis rentré à Kalakshetra pour suivre une formation en danse et en vîna ; j'ai été médaille d'or et j'ai remporté un premier prix. J'ai été invité à danser avec la danseuse contemporaine Chandralekka quelques années, et ma rencontre avec Ram Gopal m'amena sur d'autres chemins à la recherche des chorégraphies spécifiques à l'homme-danseur, car jusque là, seules les femmes dansaient et elles transmettaient le même répertoire à tout le monde.
       Longtemps, j'ai rêvé de réconcilier en moi mes deux côtés : "danseur et musicien". Aujourd'hui, j'ai trouvé mon chemin : dans mes spectacles, le public me découvre tel que je suis.


  • IR : Vous vous êtes produit sur les scènes les plus prestigieuses (Opéra Bastille...), vous avez côtoyé de grands artistes (Didier Lockwood...) : quels sont les grands moments de votre carrière que vous retenez plus particulièrement ?

    RM : Enfin, l'Art indien est respecté au même titre que tous les arts. C'est cette reconnaissance que j'ai voulu apporter, non pas pour moi mais pour mon Inde, ma ville natale Pondichéry et pour donner du courage à tous les Indiens qui veulent se lancer dans la danse et dans la musique.
       Quand je suis sur scène, je retiens l'amour pur qu'enferme l'art, le bonheur qu'il peut apporter à tout le monde. C'est un moment de partage sans limite.


  • IR : En tant que danseur, vous pratiquez deux styles classiques, le Bharata Natyam et le Kuchippudi : pourquoi ce double choix ? Quels sont les points communs et les diffirences entre ces deux styles ?

    RM : Le kuchuppudi vient du bharata natyam ; il est plus facile pour un danseur de bharata natyam d'apprendre le kuchuppudi que le contraire. Le kuchuppudi  est plus léger et cela m'amuse ; j'adore m'amuser dans mes mouvements, dans ma danse. Le bharata natyam  pour moi représente une danse de célébration du corps... une façon de s'offrir au dieu.

  • IR : Vos spectacles de danse associent-ils Bharata Natyam et Kuchippudi ? S'agit-il de pure tradition, ou ajoutez-vous à celle-ci une part de créativité plus personnelle ?

    RM : Toute tradition a un âge , une période donnée donc de quelle tradition parlez vous ?
       Il n'existe pas de pure tradition ; si une tradition n'est pas réinterprétée, elle meurt d'elle-même. Je danse ma danse ; disons que j'aime trouver tous les mouvements qui amènent à une sculpture et tous les mouvements qui la dissolvent.


  • IR :  Vous jouez en outre de cet instrument emblématique de l'Inde du sud qu'est la vîna : pouvez-vous nous parler de cet instrument, son histoire, ses caractéristiques techniques et musicales, son degré de popularité... ?

    RM : C'est un instrument extrêmement difficile ; j'ai eu la chance de l'avoir appris très jeune. Je viens de sortir un ouvrage sur la musiquue carnatique préfacé par Dr Balamuralikrishnan, le plus grand chanteur indien et Didier Lockwood. Vous y trouverez tout un chapitre consacré à cet
    instrument.
       Il existe très peu de concertistes en vîna et je fais tout un travail de sensibilisation pour le faire connaître, un peu comme Ravi Shankar pour son sitar. Je pense que d'ici vingt ans, la plupart des gens pourront faire la différence entre une vîna et un sitar.


  • IR : Quels conseils donneriez-vous à un débutant désireux de se consacrer au Bharata Natyam, au Kuchippudi, à la pratique de la vîna ?

    RM : C'est de fournir du travail et travailler avec beaucoup de passion et de persévérance. Enlever de sa tête la question de faire un spectacle. Il faut d'abord se faire plaisir et jouer pour soi.

  • IR :  Vous vivez en France, vous connaissez la culture française, le public français : d'après ce que vous observez, comment celui-ci reçoit-il la danse et la musique indiennes ? Sont-elles comprises ? Sont-elles confinées à une marginalité restreinte ? Sont-elles vouées à un essor prochain ?

    RM : Je vis parallèlement dans les deux cultures : en Inde et en France.
       Paris est la capitale des Arts, donc le public est habitué à voir tant de spectacles et il vous attend au tournant. Il faut que l'artiste ait quelque chose à montrer, à donner et à échanger. Ce n'est pas parce que c'est l'art indien qu'il faut croire que les gens ne comprennent rien à la chose et qu'ils peuvent tout gober...
       De toute fagon, un vrai art se suffit à lui même, dans le sens qu'il ne demande aucune explication ; si le message à donner est fort ; il peut être compris par n'importe qui sans distinction de couleur ni de langue.
       Quant à moi, qui pratique la danse d'homme, habillé très sobrement sur scène, le travail de mon corps est tout de suite visible ; à travers mon spectacle, je ne cherche pas du tout à convertir le public à l'hindousime ou à devenir indien. Je laisse entrevoir les énergies d'un corps fortement marqué par une technique qui est la mienne.
       Ceci étant, je laisse libre le public d'en faire chacun son histoire.


  • IR : Vous êtes originaire de Pondichéry ; quels rapports entretenez-vous aujourd'hui avec cet ancien comptoir français... et avec l'Inde et sa culture en général ? Le fait de vivre en Occident constitue-t-il à vos yeux une sorte d'exil, même volontaire ? Est-il facile d'être un "Indien à Paris" ?

    RM : Je  vis la plupart de mon temps à Pondichéry où je travaille beaucoup : je compose ma musique, je collabore aux musiques de films ; je monte mes chorégraphies etc... Ce lieu m'inspire beaucoup pour la création.
       Vivre à Paris est très excitant, car Paris est la capitale culturelle de l'Europe : une vieille civilisation : on a beaucoup à donner et à apprendre. L'ouverture de l'esprit est là : liberté d'expression artistique, liberté des moeurs etc... Je dois beaucooup à la France comme à l' Inde. Aujourd'hui, je me sens encore plus universel ; tout simplement un homme qui voyage dans le monde, avec dans ses bagages de l'Art.


  • IR :  Vous avez il y a quelque temps, en 2003, créé un opéra indien aux Antilles : quelles ont été les circonstances et la teneur de ce spectacle ?

    RM : Un opéra avec dix-huit danseurs et cinq musiciens ; l'accueil fut chaleureux pour les deux représentations à guichets fermés. Enfin, le public a pu attester que la danse indienne ne se danse pas seulement à un ou quleques danseurs, mais aussi sous la forme d'un grand ballet comme un opéra occidental.
       J'ai chorégraphié l'histoire de Madurai Veeran qui est perdue, et les gens ne s'en souviennent plus, alors que l'image est présente dans leurs petits temples. Je ne voulais pas les convertir à l'hindousime moderne, mais repartir sur les bases de leurs croyances et des souvenirs entendus par les anciens. Comme la plupart d'entre eux venaient de Pondichéry, notamment des Tamouls, ils ont pu garder quelques dieux et quelques mots en tamoul. Après ce spectacle, les gens ont réappris l'histoire de Madurai Veeran et à revoir les images indiennes mythologiques et les saveurs indiennes qui sont restées enfouies en eux avec une certaine peur.


  • IR : Quel regard portez-vous sur la population et la culture indo-antillaises, que vous avez eu l'occasion de rencontrer là-bas ?

    RM : Une population extrêmemnt touchante ; on sent dans chacun d'eux une petite part indienne et sur d'autres des vrais visages dravidiens. Et surtout les comportements tamouls sont bien inscrits : très sensibles, très à fleur de peau... un esprit de partage. Ce qui me touche : comment ces populations - aussi bien celle de la Réunion - ayant quitté l'Inde depuis plusieurs générations, ont su garder inscrits jusqu'aux cellules les comportements indiens, c'est un mystère.

  • IR : Connaissez-vous la Réunion et la nombreuse population d'origine indienne qui y vit ? A quand un spectacle ou une tournée de Raghunath Manet à la Réunion ?       

    RM : Il suffit de m'inviter et j'ai surtout envie d'incorporer les artistes (musiciens et danseurs) de la Réunion et créer un spectacle. J'attends les invitations...

 

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Site Internet

      Le site officiel de Raghunath Manet, bilingue anglais/français, est à la fois agréable et informatif. Un design soigné aux tonalités claires-obscures crée une ambiance chaleureuse. Les rubriques sont celles que l'on attend, et elles ne déçoivent pas : celle qui s'intitule "Dance" propose au passage un biographie de l'artiste ; la partie "Performances" (dans le sens anglais du terme) évoque plusieurs grands spectacles ; "Musique" insiste notamment sur des instruments typiques de la musique carnatique, en particulier la vîna (veena).      
   A partir de la rubrique CD, on découvre une discographie répertoriant neuf opus et on accède à des téléchargements de MP3 (courts extraits des divers morceaux du dernier disque). Les autres pages du site sont consacrées à un calendrier des spectacles, à une revue de presse, à une galerie de photos et, aspect non négligeable, aux livres écrits par Raghunath Manet : Les Bayadères et La Musique carnatique.
   L'adresse du site est la suivante : http://www.raghunathmanet.com
  

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Acheter des albums de
Raghunath Manet

   Je vous propose ici trois CDs récents de Raghunath Manet. Pondichéry II est le plus "indien" des trois, si cela a un sens. Une musique conçue pour la danse, au son de la vîna, bien sûr, mais aussi d'instruments traditionnels tels que le tampura, la flûte ou le mridangam.
   Omkara, référence au son primordial et original, tantôt délibérément rythmique, tantôt planant, prend une coloration jazzy dont on ne s'étonnera pas... puisque le violon de Didier Lockwood vient mêler ses sonorités à la vîna. Egalement à l'affiche : Caroline Casadesus et Murugan.
   Avec Indiamond, c'est encore un autre univers musical que l'on aborde : la rythmique souvent implacable de la techno fait entrer la musique indienne dans une ère résolument post-industrielle aux accents festifs, parfois un peu froids. Le disque est co-signé Albert de Paname et Raghunath Manet.

Cliquez sur les liens suivants pour acheter des CDs de Raghunath sur le site de la FNAC :

                   

Pondichéry II

Omkara

Indiamond

 

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