A
partir
de
considérations
sur
la
coiffure
à
rajouts
et
les
dreadlocks,
Gerry
L'Étang
interroge
les
causes
politiques
et
économiques
de
la
distanciation
d’avec
l’État
que
constitue
à la
Martinique
le
fait
de
nommer
"Chivé-léta"
un
élément
étranger
à
soi
(rajouts),
puis
analyse
les
fondements
symboliques,
affichés
et
occultés,
du
"Chivé-rasta".
Par-delà les oppositions entre ces coiffures, le projet ici est de
mettre
au
jour
des
croisements
de
civilisations
suscités
respectivement
par
deux
mondialisations :
la
globalisation
économique
et
la
créolisation.
De "Gouvelman" à "Léta"
Une
expression
riche
de
sens
est
apparue
ces
dernières
années
dans
le
créole
martiniquais :
"Chivé-léta".
Elle
désigne
des
cheveux
ajoutés
portés
par
des
Martiniquaises
noires
ou
métisses.
Ces
rajouts
noués,
tressés,
tissés
ou
collés,
tous
importés,
sont
synthétiques
ou
naturels.
Nous laisserons de côté l’aliénation que peut recouvrir un choix
esthétique
consistant
ruser
avec
la
nature
pour
se
conformer
au
modèle
de
chevelure
européen,
cette
question
a
déjà
été
traitée
(1).
Nous
nous
intéresserons
ici
à
l’appellation
elle-même.
Dans
l’expression,
dont
la
traduction
littérale
est
:
"Cheveux
de
l’État",
l’intéressant,
c’est
l’État.
Caractériser
des
cheveux
extérieurs
à
soi
comme
étant
des
Cheveux
de
l’État,
mérite
réflexion.
L’État désigne "l’autorité politique souveraine […] considérée comme
une
personne
juridique
et
morale
à
laquelle
est
soumise
un
groupement
humain
vivant
sur
un
territoire
donné"
(2).
Dans
les
sociétés
démocratiques,
l’État
est
l’émanation
du
peuple.
Dans
ce
contexte,
l’État,
philosophiquement,
idéalement,
c’est
nous.
Or
en
désignant
comme
provenant
de
l’État
un
élément
étranger
à
soi,
l’appellation
Chivé-léta
opère
une
dissociation,
une
distanciation
d’avec
l’État.
L’État
ici,
ce
n’est
pas
nous,
c’est
l’autre.
En Martinique, l'État est désigné historiquement en créole par le
terme
"Gouvelman".
L'usage
du
mot
allait
s'affaiblir
en
raison
de
la
décréolisation
linguistique,
prolongement
d'une
décréolisation
culturelle
générale
entraînée,
entre
autres,
par
la
disparition
du
système
des
plantations.
L'adoption
de
Léta
en
lieu
et
place
de
Gouvelman
est
un
exemple
de
francisation
lexicale.
L'expression
Léta
réduit
l'écart
entre
le
mot
créole
qu'il
remplace
et
son
équivalent
français.
Car
si
les
termes
Gouvelman
et
Léta
sont
tous
deux
des
emprunts
au
français,
le
premier
présente
un
double
écart.
Un
écart
de
forme
par
rapport
au
mot
emprunté
(Gouvelman
au
lieu
de
Gouvernement),
et
un
écart
de
sens
entre
le
terme
français
emprunté
et
le
mot
créole
: le
Gouvernement
n'est
pas
l'État.
A
l'inverse,
le
lexème
de
remplacement
ne
présente
plus
qu'un
seul
écart,
de
forme,
par
rapport
à
son
équivalent
français
:
Léta
au
lieu de
État.
Le passage d'une expression à l'autre s'accompagne d'une modification
de
la
perception
de
l'État.
A
mesure
que
la
prédation
coloniale
qu'exerçait
le
Gouvelman
au
côté
du
"Béké"
(planteur
blanc
créole)
laissait
place,
à
compter
de
la
départementalisation
de
1946,
à
des
relations
plus
apaisées,
à
mesure
que
l'institution
étatique
avait
de
moins
en
moins
recours
– du
fait
du
délitement
de
la
société
de
plantation
– à
la
violence
que
nécessitait
le
fonctionnement
même
de
cette
société,
à
mesure
que
cette
institution
remplaçait
le
béké
en
tant
que
pourvoyeur
de
travail,
que
les
ressources
qu'elle
dispensait
allaient
croissant,
Léta
se
substitua
à
Gouvelman.
Si ce changement lexical s'assortit d'une perception plus favorable
de
l'État,
ce
dernier
n'en
reste
pas
moins
perçu
par
les
Martiniquais
comme
une
institution
extérieure,
sise
en
France
et
émanant
de
la
société
de
ce
pays.
Les
concernés
le
perçoivent
ainsi
parce
qu'ils
n'interfèrent
en
rien
dans
sa
définition.
Certes,
dans
la
mesure
où
les
Martiniquais
participent
au
jeu
démocratique
français,
les
représentants
de
l’État
sont
aussi,
théoriquement,
les
leurs.
Pour
des
raisons
mathématiques
il
en
va
autrement
:
les
dizaines
de
milliers
de
voix
martiniquaises
ne
pèsent
quasiment
rien
par
rapport
aux
dizaines
de
millions
de
voix
françaises.
A
preuve,
jusqu'à
récemment
les
résultats
des
élections
présidentielles
et
parlementaires
– et
donc
d’élus
définissant
l’État
–
étaient
annoncés
en
France
alors
même
que
les
procédures
de
vote
étaient
encore
en
cours
dans
l'île
du
fait
du
décalage
horaire.
En
outre,
maintes
de
ces
élections
ont
abouti
à
des
résultats
différents
en
Martinique
et
en
France
sans
que
ces
oppositions
aient
influencé
la
politique
martiniquaise
des
représentants
de
l’État.
Pour
ces
raisons,
l’État
apparaît
en
Martinique
comme
une
institution
extérieure,
ainsi
qu’en
témoigne
l’expression
Chivé-léta.
Cheveux offerts par l’État
Mais
le
mot
semble
désigner
aussi
autre
chose,
plus
lourd
de
sens.
Une
autre
traduction
possible
de
Chivé-léta est :
"Cheveux
offerts
par
l’État".
Au cours de la décennie 1960 se produisit à la Martinique une rupture
économique.
Les
effectifs
de
l'agriculture
et
ceux
de
l'industrie
de
transformation
de
la
canne
(usines
à
sucre,
distilleries),
qui
constituaient
l'écrasante
majorité
des
travailleurs
des
secteurs
primaire
et
secondaire,
devinrent
minoritaires
au
sein
de
la
population
active.
Ce
fut
la
fin
d’une
société
de
plantation
qui
avait
trois
siècles
durant
régenté
la
vie
des
Martiniquais.
Se
mit
alors
progressivement
en
place
une
économie
reposant
sur
des
transferts
de
l’État
(et
dans
une
moindre
mesure,
de
l’Union
européenne
:
équipements
structurants,
soutien
à
une
agriculture
d’exportation
déclinante,
etc.).
Cette
économie,
très
largement
tertiarisée,
est
donc
alimentée
principalement
par
le
contribuable.
Un chiffre symbolise cette dépendance : le taux de couverture des
importations
par
les
exportations,
13,2
% en
2007,
soit
un
déficit
commercial
de
2,1
milliards
d’euros
(3).
La
situation
est
d’autant
plus
critique
que
ce
chiffre
de
13,2
%
concerne
en
grande
partie
des
exportations
hautement
subventionnées,
singulièrement
les
produits
agricoles,
la
banane
par
exemple
coûtant
plus
cher
à
produire
que
ce
qu’elle
ne
rapporte
effectivement.
En pareille situation, beaucoup en Martinique est offert par l’État,
qui
y
transfuse
des
sommes
considérables
:
2,6
milliards
d’euros
pour
l’année
2007.
Toutefois,
les
Martiniquais
étant
soumis
à
l'impôt,
les
recettes
de
l'État
en
Martinique,
tous
prélèvements
confondus,
se
montaient
à
1,4
milliard
d’euros
en
2007.
Ce
dernier
récupère
donc
54,5
% de
sa
mise.
Reste
un
transfert
net
de
1,2
Milliard
d'euros
(4).
Par
ailleurs,
l'évolution
du
rapport
entre
les
montants
versés
à
l'île
et
ceux
recouvrés
par
l'impôt
est
défavorable
à
l'État.
En
2003,
il
récupérait
75,7
%
des
sommes
affectées
(5).
Cette perfusion entretient peu ou prou tout le monde à la Martinique.
C’est
le
cas
des
RMIstes
ou
des
fonctionnaires.
C’est
aussi
le
cas
des
professions
libérales,
commerçantes,
agricoles,
industrielles
ou
de
service.
Dans
cette
société
officiellement
capitaliste,
le
capitalisme
représente
avant
tout
un
cadre
de
circulation
monétaire,
une
organisation
pour
la
redistribution
de
fonds
injectés
de
France,
auxquels
il
n'est
apporté
qu'une
valeur
ajoutée
générée
par
des
dépenses
de
consommation.
Ici,
les
bénéfices
tirés
de
capitaux
fournis
à
l'occasion
par
l’État
(à
travers
la
défiscalisation
par
exemple),
sont
alimentés
par
des
clients
qui
règlent
avec
des
sommes
versées
en
partie
par
ce
même
État.
On
aboutit
alors
à la
situation
suivante :
le
niveau
socioéconomique
des
individus,
quel
que
soit
leur
secteur
d’activité,
varie
d'abord
selon
la
part
de
manne
qu’ils
obtiennent
directement
ou
indirectement
de
l’État,
ensuite
suivant
leur
capacité
à
produire
de
la
plus-value
à
partir
des
sommes
obtenues.
L’économie martiniquaise accumule les paradoxes, superpose socialisme
et
capitalisme.
Comme
dans
les
sociétés
socialistes,
elle
est
financée
par
l’État,
mais
cet
État
émane
d’une
société
capitaliste,
caractérisée,
elle,
par
la
propriété
privée
des
moyens
de
production,
la
recherche
du
profit,
la
liberté
d’échange,
la
spéculation,
la
concurrence.
Et
ces
caractéristiques
capitalistes
de
la
société
française
perfusante
sont
apparemment
plaquées
en
Martinique
alors
même
qu’un
processus
inverse,
socialiste,
irrigue
l’économie
de
ce
pays.
Pour
autant,
et
ce
n'est
pas
le
moindre
des
paradoxes,
cette
société
structurellement
assistée
coûte
peu
à la
société
qui
l'assiste.
Car le mécanisme de récupération des fonds transférés ne se limite
pas
à
l'impôt.
Le
fonctionnement
économique
de
la
Martinique
coûte
moins
qu'il
n'y
paraît
à la
société
française
parce
qu'il
s'opère
en
circuit
fermé
:
les
fournisseurs
de
l'île
sont
majoritairement
des
entreprises
françaises.
Dans
ce
système,
les
principes
du
capitalisme
sont
en
fait
loin
d’être
tous
effectivement
plaqués,
c’est
le
cas
de
la
concurrence.
Certes,
il y
a
concurrence
relative
sur
le
plan
interne
car
les
flux
financiers
en
provenance
de
France
sont
redistribués
dans
un
cadre
partiellement
concurrentiel.
Si
certains
importateurs,
gros
commerçants,
industriels
de
Martinique
bénéficient
de
situations
monopolistiques
ou
oligopolistiques,
d’autres,
moyens
et
petits
commerçants,
artisans,
agriculteurs
vivriers
et
maraîchers,
prestataires
de
services,
sont
en
compétition
dans
leurs
domaines
respectifs
pour
écouler
leurs
produits,
s’assurer
des
clients.
Il en va différemment sur le plan externe. Suivant l’un des axiomes
régissant
l’Exclusif
d’Ancien
Régime,
jamais
remis
fondamentalement
en
cause : "La
colonie
n’importera
que
de
métropole",
les
biens
de
consommation
proviennent
essentiellement
de
France
(secondairement
d’Europe
et
d’ailleurs).
Même
les
produits
manufacturés
hors
de
France
transitent
pour
la
plupart
par
ce
pays
avant
d’être
réexpédiés
en
Martinique.
Ainsi
le
système
bénéficie-t-il
aussi
à
l’industrie
et
au
commerce
français,
et
peut
être
interprété
comme
une
forme
de
soutien
de
l'État
à
ces
secteurs
(6).
Ce
mode
de
récupération
monétaire
n'est
pas
sans
rappeler
celui
qui
avait
cours
au
sein
de
la
plantation
post-esclavagiste.
Là,
des
pièces
de
métal
gravées
aux
initiales
du
planteur,
les
Caïdons,
étaient
données
en
rémunération
aux
ouvriers
agricoles,
lesquels
ne
pouvaient
les
utiliser
que
dans
la "Boutik"
(épicerie)
du
béké
située
sur
l'exploitation.
Le
propriétaire
récupérait
ainsi
les
salaires
versés.
Enfin, des sociétés opérant en Martinique (raffinerie, compagnies
aériennes,
certaines
entreprises
de
btp,
de
téléphonie,
de
télévision,
de
radio,
de
presse...)
ont
leurs
actionnaires
–
voire
leur
sièges
sociaux
– en
France
et y
rapatrient
leurs
profits.
L'expression Chivé-léta rend compte de cette dépendance politique
et
économique,
de
cette
altérité
qui
décide
et
qui
paye.
Dreadlocks
Les
seuls
en
Martinique
à
refuser
radicalement
cette
tutelle
politique
et
économique
sont
de
rares
rastas
intransigeants,
nouveaux
marrons
qui,
des
grands
bois
des
hauts
mornes
où
ils
trouvent
parfois
refuge,
rejettent
avec
écœurement
cet
avatar
de
"Babylone".
Les rastas partagent avec les adeptes du Chivé-léta un type de coiffure
qui
vise
l’extension.
Mais
contrairement
à la
"coiffure
léta"
qui
y
parvient
artificiellement,
la
coiffure
rasta
l’obtient
I-Talment,
naturellement.
Le
principe
sollicité
ici
n’est
pas
l’ajout
mais
l’emmêlement.
Les
cheveux
morts
(tout
individu
perd
normalement
de
50 à
100
cheveux
par
jour),
à
défaut
d’être
détachés
par
le
peigne
ou
la
brosse,
s’emmêlent
naturellement
aux
cheveux
vivants.
Ainsi
la
chevelure
croît
continûment.
L’enchevêtrement
spontané
des
cheveux
peut
par
ailleurs
être
renforcé
par
des
soins
appropriés,
parmi
lesquels
l’apport
de
substances
liantes.
D’autres différences opposent ces coiffures : l’une est eurocentrée,
l’autre,
afrocentrée.
Il
s’agit
pour
les
rastas
de
reproduire
symboliquement
la
crinière
du
lion
de
Juda,
allégorie
de
la
royauté
éthiopienne,
emblème
animalier
de
la
dynastie
des
rois
David
et
Salomon,
dont
Hailé
Sélassié,
déité
centrale
du
rastafarisme,
revendiquait
la
filiation.
Une autre source rasta du port des dreadlocks trouve son fondement
dans
la
Bible,
laquelle
aurait
inspiré
l’expression
Dreadlocks :
"Dread
of
God",
"Crainte
de
Dieu".
Il y
est
écrit :
"Pendant
tout
le
temps
de
son
naziréat,
le
rasoir
ne
passera
point
sur
sa
tête
;
jusqu'à
l'accomplissement
des
jours
pour
lesquels
il
s'est
consacré
à
l'Éternel,
il
sera
saint,
il
laissera
croître
librement
ses
cheveux"
(7).
Un autre passage de la Bible associe cheveux longs et force, leur
rasage
entraînant
faiblesse,
abandon
par
Dieu.
Il
concerne
la
geste
de
Samson :
"Il
lui
ouvrit
tout
son
cœur,
et
lui
dit
: Le
rasoir
n'a
point
passé
sur
ma
tête,
parce
que
je
suis
consacré
à
Dieu
dès
le
ventre
de
ma
mère.
Si
j'étais
rasé,
ma
force
m'abandonnerait,
je
deviendrais
faible,
et
je
serais
comme
tout
autre
homme.
Delila,
voyant
qu'il
lui
avait
ouvert
tout
son
cœur,
envoya
appeler
les
princes
des
Philistins,
et
leur
fit
dire
:
Montez
cette
fois,
car
il
m'a
ouvert
tout
son
cœur.
Et
les
princes
des
Philistins
montèrent
vers
elle,
et
apportèrent
l'argent
dans
leurs
mains.
Elle
l'endormit
sur
ses
genoux.
Et
ayant
appelé
un
homme,
elle
rasa
les
sept
tresses
de
la
tête
de
Samson,
et
commença
ainsi
à le
dompter.
Il
perdit
sa
force.
Elle
dit
alors
:
Les
Philistins
sont
sur
toi,
Samson
! Et
il
se
réveilla
de
son
sommeil,
et
dit
: Je
m'en
tirerai
comme
les
autres
fois,
et
je
me
dégagerai.
Il
ne
savait
pas
que
l'Éternel
s'était
retiré
de
lui"
(8).
Rastafarisme et hindouisme
Cette
allégeance
à
Sélassié
et à
la
Bible
masque
toutefois
d’autres
origines.
A
partir
des
années
quatre-vingt,
les
travaux
d’Ajai
et Laxmi
Mansingh
(uwi,
Mona,
Jamaïque)
(9),
relayés
par
ceux
d’Hélène
Lee
(10),
ont
mis
au
jour
la
proximité
symbolique
et
rituelle
du
rastafarisme
et
de
l’hindouisme.
De 1845 à 1917, 36 412 immigrants indiens furent introduits à la
Jamaïque.
Ces
arrivées
s'inscrivaient
dans
un
contexte
plus
large.
Suite
aux
abolitions
de
l'esclavage,
les
planteurs
des
colonies
britanniques,
françaises
et
néerlandaises
de
la
région,
afin
d'accroître
leur
production
tout
en
payant
les
salaires
les
plus
bas
possible,
saturèrent
la
demande
de
travail
par
l'appel
à de
nouvelles
immigrations.
Plus
d’un
demi-million
de
contractuels
indiens
arrivèrent
alors
dans
la
Caraïbe.
Ce
nouvel
apport
complexifia
un
processus
d'interaction
culturelle
qui
jusque
là
s'était
opéré
entre
trois
éléments
:
amérindien,
européen
et
africain.
A la
Jamaïque,
des
contenus
religieux
apportés
par
l'immigration
indienne
contribuèrent
à
l'édification
d'une
des
plus
emblématiques
religions
de
la
Caraïbe
: le
rastafarisme.
Les éléments hindous intégrés à la pratique rastafari allaient être
réinterprétés
au
travers
de
correspondances
établies
avec
des
préceptes
de
la
Bible.
Il
s'agit
entre
autres
de
la
consommation
de
"Ganja"
(Cannabis
sativa),
terme
hindi
désignant
une
plante
importée
dans
l'île
par
des
immigrants
hindous
qui
en
faisaient
un
usage
cérémoniel.
Elle
sera
interprétée
par
les
rastas
comme
un
don
du
dieu
biblique
:
"arbre
de
vie
[...]
dont
les
feuilles
servaient
à la
guérison
des
nations"
(11).
Ils
en
feront
eux
aussi
une
consommation
rituelle.
A
cela
s'ajoute
le
végétarisme,
cohérent
avec
certains
passages
des
Écritures,
tel
:
"Il
est
bien
de
ne
pas
manger
de
viande"
(12).
Il
s'agit
toutefois
ici
d'un
végétarisme
sélectif,
où
la
viande
est
prohibée
mais
le
poisson
permis
(ce
type
de
régime
se
retrouve
néanmoins
aussi
en
Inde,
singulièrement
au
sein
des
communautés
hindoues
côtières).
On
retrouve
encore
l'interjection
hindi
"Jai
!",
signifiant
Victoire !,
utilisée
par
les
hindous
en
hommage
à
leurs
divinités
(Jai
Kali
! :
Victoire
à
Kali
!).
Elle
inspira
aux
rastas
l'usage
du
mot
"Jah",
contraction
par
ailleurs
de "Jehovah"
(d'après
"Yah",
réduction
de
"Yahvé"
dans
la
Bible
hébraïque).
Par
ailleurs,
la
croyance
en
l’impureté
du
sang
cataménial
est
commune
au rastafarisme
et à
l’hindouisme,
et
est
cohérente
là
aussi
avec
certains
versets
de
la
Bible
comme :
"La
femme
qui
aura
un
flux,
un
flux
de
sang
en
sa
chair,
restera
sept
jours
dans
son
impureté.
Quiconque
la
touchera
sera
impur
jusqu'au
soir"
(13).
En
outre,
la
foi
rastafari
fait
une
certaine
place
à la
réincarnation,
au
moins
en
ce
qui
concerne
Haïlé
Sélassié,
incarnant
pour
les
rastas
le
Messie
biblique
(quand
ce
n'est
Dieu
lui-même).
Enfin,
les
dreadlocks
sont,
par-delà
les
justifications
tirées
des
Écritures,
un
des
emprunts
hindous
les
plus
évidents.
Jata
Une photographie de Jamaïque datant de 1900 environ, publiée par Laxmi et Ajai Mansingh, représente au premier plan, devant des cases de plantation, un groupe de femmes et d'enfants indiens. Au second plan, à droite, un homme arbore ce qui ressemble à de longs cheveux emmêlés. Les Mansingh l’identifient comme un "Jatadhari" (14).
Indiens,
Jamaïque,
vers
1900
Les
Jatadhari,
ou
"porteurs
de
Jata"
(locks),
sont
en
Inde
des
Sadhu.
Ces
ascètes
vont
de
ville
en
village,
pratiquant
le
yoga,
mendiant
leur
nourriture,
vêtus
de
tissus
de
couleur
blanche
ou
ocre,
parfois
nus,
couverts
de
cendres.
Nombre
d’entre
eux
sont
d’obédience
shivaiste.
Ce
sont
de
grands
consommateurs
de
ganja,
"l’herbe
de
Shiva",
qu’ils
considèrent
comme
un
sacrement,
un
bienfait
de
cette
divinité,
et
qu’ils
utilisent
pour
entrer
en
fusion
avec
elle
(15).
Leurs jata sont un autre symbole de Shiva, qui lui-même porte des
locks
emmêlés,
lâchés
et/ou
retenus
en
chignon.
Le
terme
"Jatadhara"
(ou
Jatadhari)
est
d’ailleurs
"un
des
noms
de
Shiva
en
tant
que
Yogin"
(16).
Le mythe de la Descente du Gange, consigné dans le Mahabharata
(17),
le
Ramayana
(18)
et
les
Purana,
associe
la
chevelure
du
dieu
à la
naissance
de
cette
rivière
sacrée
des
hindous,
considérée
comme
la
mère
de
l’Inde.
Jaillie
des
cieux,
elle
fut
amortie
par
la
chevelure
abondante
de
Shiva,
et
de
là,
répandue
sur
terre.
"‘Gangadhara’,
‘porteur
de
Ganga’,
est
une
épithète
donnée
à
Shiva
recevant
sur
sa
tête
les
flots
du
Gange
[…],
qui,
après
avoir
arrosé
le
Kaïlasa,
auraient
coulé
sur
la
tête
de
Shiva.
Celui-ci,
secouant
ses
cheveux,
en
laisserait
alors
tomber
les
eaux
goutte
à
goutte
pour
former
le
fleuve
et
les
grands
lacs
du
Nord
de
l’Inde"
(19).
Les
jata
des
sadhu
shivaistes
figurent
donc
le
dieu
que
vénèrent
ces
derniers
et
rappellent
le
rôle
joué
par
Shiva
dans
la
cosmogonie
hindoue.
Les premiers à arborer des locks à la Jamaïque furent les quelques
sadhu
qui
s’étaient
glissés
dans
les
convois
d’immigrants
indiens.
Par
la
suite,
leur
chevelure
se
diffusa
en
milieu
rastafari.
Certains
aînés
rastas
se
souviennent
avoir
appelé
les
locks
‘Zagavi’,
du
mot
hindi
‘Jatawi’"
(20).
Ce processus d’appropriation est peut-être symbolisé par le cliché
publié
par
les
Mansingh.
Les
détails
de
l’homme
sur
la
photographie
ne
sont
pas
clairs
et
suscitent
des
conjectures.
Il
n’est
pas
certain
qu’on
ait
affaire
ici
à un
sadhu
indien.
Il
est
possible
qu’il
s’agisse
d’un
Jamaïcain
d’ascendance
africaine
qui,
évoluant
en
milieu
hindou,
aurait,
au
terme
d’un
processus
d’acculturation,
affiché
les
attributs
capillaires
d’un
sadhu
shivaiste.
Ses
traits
semblent
négroïdes
et
seule
la
moitié
de
sa
chevelure
paraît
concernée
par
les
jata,
qui
seraient
en
fait
une
sorte
de
demi-perruque
confectionnée
à
partir
de
mèches
nattées
et/ou
attachées,
puis
liées
aux
cheveux
naturels.
En
outre,
alors
que
les
femmes
et
enfants
indiens
figurant
au
premier
plan
revêtent
des
coiffes
et
vêtements
créoles,
l’homme
porte
une
chemise
de
type
européen
mais
aussi
ce
qui
ressemble
à un
dhoti,
vêtement
traditionnel
de
l’Inde
du
nord,
cotonnade
blanche
nouée
autour
de
la
taille,
l’un
des
pans
passant
entre
les
jambes
avant
d’être
fixé
au
ventre,
le
tout
constituant
une
sorte
de
pantalon.
Si
cette
interprétation
est
pertinente,
cette
photo
donnerait
à
voir
un
cas
d’interpénétration
culturelle,
annonciateur
des
dreadlocks
et
au-delà,
du
rastafarisme.
Leonard Howell
Les
apports
de
l'hindouisme
au
rastafarisme
s'inscrivent
dans
le
cadre
général
d'un
phénomène
de
créolisation.
C'est
à
dire
ici,
d'hybridation
entre,
d’une
part,
des
traits
culturels
déterritorialisés,
et,
d’autre
part,
les
traits
d’une
société
d’accueil
elle-même
produite
par
la
déterritorialisation
et
l’hybridation.
Le
tout
en
contexte
plantationnaire.
Mais
ils
ont
aussi
pour
origine
le
processus
particulier
que
représenta
le
parcours
du
principal
fondateur
du
mouvement
rastafari :
Leonard
Percival
Howell.
Howell, qui était probablement dès son enfance à Clarendon (Jamaïque)
au
contact
d’hindous,
fut
aussi
influencé
par
la
culture
de
l’Inde
lors
de
ses
séjours
à
New-York,
entre
1912
et
1932
(entrecoupés
d’arrêts
à
Panama
et
de
voyages
de
par
le
monde),
à
une
époque
où
religiosité
et
magie
hindoues
étaient
en
vogue
dans
cette
ville.
Il
le
fut
encore
par
ses
lectures
sur
l’hindouisme.
Joseph
Nathaniel
Hibbert,
cofondateur
du
rastafarisme
et
un
temps
adjoint
d’Howell,
rapporte
que
"lorsque,
en
1918,
[Howell]
entendit
parler
des
incarnations
divines
en
Inde,
il
se
procura
des
livres
à
leur
sujet.
Discutant
avec
ses
amis,
il
conçut
l’idée
d’une
incarnation
africaine
de
Dieu,
comparable
à
Rama,
Krishna
et
Bouddha"
(21).
A son retour en Jamaïque en 1932, quand, pénétré des idées laïques
de
Marcus
Garvey
(22)
et
religieuses
d’Athlyi
Rogers
(23),
Leonard
Howell
établit
les
bases
de
ce
qui
deviendra
le
mouvement
rastafari,
il
prend
un
pseudonyme
hindou :
"Gangun
Guru
Maragh" :
"Grand
Roi
Gourou
du
Savoir
et
des
Vertus"
(24).
Il
signe
de
ce
nom
(G.
G.
Maragh)
un
texte
prophétique
qui
paraît
en
1935 :
The
Promised
Key
(25).
Gangun
donnera
par
glissement,
"Gong",
appellation
la
plus
connue
de
Leonard
Howell
("The
Gong").
Cette
dénomination
sera,
à
travers
"Tuff
Gong",
récupérée
ultérieurement
par
Bob
Marley,
pour
lui-même
ainsi
que
pour
son
label
(et
studio
d’enregistrement).
La revenue d’Howell au pays le voit également entouré d’Indiens.
Particulièrement
d’un
certain
Laloo
qui
fut
son
garde
du
corps
et
qui
aurait
contribué
à
instiller
dans
le
rastafarisme,
alors
en
formation,
des
éléments
hindous.
Plusieurs
Jamaïcains
d’ascendance
indienne
rejoignirent
le
mouvement
rasta,
à sa
naissance
ou
par
la
suite.
C’est
le
cas
de
Countryman.
L’affiche
du
film
du
même
nom
(réalisé
par
Dickie
Jobson
en
1982),
le
représente
courant,
locks
au
vent.
Reproduite
en
couverture
du
disque
tiré
de
la
bande
sonore
du
film,
cette
affiche
constitue
un
élément
notable
de
l’iconographie
rasta
(26).
Offrande
Par
une
singulière
conjonction,
le
Chivé-rasta
et
une
part
du
Chivé-léta
se
trouvent
avoir
la
même
source :
l’Inde.
Il
s’agit
dans
le
premier
cas
d’origine
symbolique,
dans
le
second,
d’origine
matérielle.
A la
Martinique,
une
part
des
Chivé-léta,
plus
précisément,
une
partie
des
rajouts
naturels,
est
en
effet
importée
d’Inde.
L’origine indienne de Chivé-léta en Martinique est une conséquence
de
la
globalisation,
laquelle
permet
à
des
pôles
devenus
économiquement
performants
de
diffuser
à
travers
le
monde
un
nombre
croissant
de
biens.
Ces
biens,
qui
ont
des
conséquences
sur
les
modes
de
vie
des
sociétés
qui
les
reçoivent,
propagent
parfois
la
culture
des
pays
dont
ils
proviennent.
Ici,
il
n’en
n’est
rien.
Les
extensions
venant
d’Inde,
tout
comme
celles
provenant
de
Chine,
n’indianisent
pas,
ne
sinisent
pas
celles
qui
les
portent.
Elles
optimisent
des
coiffures
européennes
ou
européanisent
des
cheveux
africains.
Paradoxalement, la culture indienne est à la genèse du rajout indien.
Car
si
l’Inde
occupe
une
position
forte
sur
le
marché
mondial
de
l’extension
capillaire
naturelle,
elle
la
doit
à
l’existence,
en
amont
du
circuit
du
cheveu
indien,
d’un
stock
considérable,
renouvelable,
de
cheveux
gratuits.
Au fondement du rajout indien se trouve un rite hindou consistant à
offrir
aux
dieux
sa
chevelure,
en
anticipation
ou
en
remerciement
d’une
grâce (guérison,
naissance,
mariage,
succès,
etc.)
Le
don
de
cheveux
étant
considéré
par
les
dévots
comme
"l’expression
de
gratitude
la
plus
estimable"
(27),
hommes
et
femmes
convergent
quotidiennement
vers
les
sanctuaires
y
sacrifier
leur
chevelure.
Des
tonnes
de
mèches
sont
alors
disponibles.
L’offre
augmente
encore
lors
des
grandes
fêtes,
qui
peuvent,
dans
les
temples
importants
comme
celui
de
Venkateshwara
à
Tirupati
(épicentre
de
l’offrande
capillaire
hindoue),
réunir
plus
de
cent
mille
pèlerins
par
jour.
Cette
pratique
votive
imprègne
tant
la
société
indienne
qu’elle
s’est
imposée
dans
certains
lieux
non
hindous
comme
le
Dargah
(mausolée)
du
saint
musulman
Nagourmira
à
Nagore,
ou
les
églises
catholiques
Notre-Dame
de
la
Bonne
Santé
à
Velanganni
(véritable
Lourdes
indien)
ou
Saint-Antoine
de
Padoue
à
Puliyampatti.
Ces cheveux qui autrefois finissaient brûlés, sont aujourd’hui récupérés
par
le
marché
international
du
cheveu
naturel.
Cela
représente
désormais
une
ressource
appréciable
pour
des
milliers
de
centres
religieux
(jusqu’à
150
euros
le
kilo
pour
les
plus
belles
chevelures).
Revenus
par
ailleurs
en
forte
croissance
d’une
année
à
l’autre.
Mais
les
profits
les
plus
conséquents
sont
pour
ceux
situés
en
aval
de
cette
industrie.
La mèche de 100 grammes est vendue par les grossistes de Chennai
(Madras)
après
conditionnement,
de
40 à
80
euros.
Le
prix
varie
selon
la
qualité,
la
longueur
:
plus
c'est
long,
plus
c'est
cher,
et
l'aspect
:
les
cheveux
raides
coûtent
moins
cher
que
les
cheveux
bouclés
(les
cheveux
blancs,
rares,
sont
d’un
prix
plus
élevé).
Arrivée
dans
les
salons
de
coiffure
occidentaux,
la
mèche
est
alors
facturée
au
client
trois
fois
plus
cher.
Il
existe
aussi
d’autres
circuits,
où
des
cheveux
achetés
en
vrac
aux
temples,
sont,
après
traitement
sommaire
en
Inde
(lavage,
triage),
expédiés
pour
transformation
dans
des
usines
de
Chine,
d’Europe
ou
du
Maghreb,
avant
de
se
retrouver
entre
les
mains
des
coiffeurs.
Le
montant
total
d’une
coiffure
sophistiquée
de
longueur
et
de
volume
importants,
peut
atteindre
1 000
euros,
quand
des
cheveux
somptueux
sont,
petite
mèche
après
petite
mèche,
fixés
à
froid
avec
des
points
de
kératine.
Les vendeurs occidentaux de cheveux indiens tirent de l’acte d’offrande
à la
source
du
produit
qu’ils
proposent,
un
argument
commercialo-éthique.
Aussi
peut-on
lire
sur
le
site
d’un
de
ces
marchands :
"Outre l'argument de la qualité, il existe également un argument
plus
moral
dans
le
choix
de
cheveux
d'origine
indienne.
Les
femmes
hindoues
font
le
sacrifice
de
leurs
cheveux
lors
d'une
cérémonie
religieuse,
parfois
plusieurs
fois
dans
leur
vie.
Elles
ne
les
vendent
pas.
La
motivation
des
donneuses
est
claire
et
pure.
Et
les
fonds
sont
utilisés
pour
l'entretien
des
temples
et
diverses
œuvres
sociales
comme
des
hôpitaux
gratuits.
Les
raisons
qui
poussent
les
femmes
d'autres
pays
à
vendre
leurs
cheveux
sont
parfois
moins
poétiques"
(28).
A l’intersection de plusieurs cultures, Les Chivé-léta indiens sont
des
nœuds
de
désirs,
de
transferts.
Fascinées
par
les
coiffures
de
certaines
stars
afro-américaines
(petites-filles
de
l’Amérique
des
plantations
soumises
aux
cannons
esthétiques
de
l’Euro-Amérique),
des
Martiniquaises
recyclent
les
chevelures
que
des
Indiennes
ont
offert
à
Vishnou
dans
l’espoir
qu’il
leur
donnera
des
enfants
mâles.
***
Enfin, Chivé-léta et Chivé-rasta ont inspiré une nouvelle coiffure : des rajouts ayant l’apparence de dreadlocks. Cette sorte de "Chivé-léta-rasta" rompt avec les oppositions sémiologiques entretenues par les modèles de référence : artificiel/naturel, eurocentrisme/afrocentrisme, aliénation/ressourcement. Ou plutôt, les dépasse. Elle témoigne, une fois encore, de la capacité de l’homme à récupérer, associer, réinterpréter. C’est ainsi que se forment les modes. C’est ainsi aussi que se forment les cultures.
* Conférence donnée par Gerry L’Étang, anthropologue (Centre de recherches interdisciplinaires en lettres, langues, arts et sciences humaines - crillash), ufr lsh, Université des Antilles et de la Guyane, Schœlcher, 15 mai 2009.
Notes
(1)
On
consultera
sur
ce
point,
l’ouvrage
de
Juliette
Sméralda :
Peau
noire,
cheveux
crépus :
l’histoire
d’une
aliénation,
Jasor,
Pointe-à-Pitre,
2005.
(2)
Dictionnaire
Le
trésor
de
la
langue
française
(tlf),
entrée
"État",
en
ligne :
http://atilf.atilf.fr/tlf.htm
(3)
iedom,
Martinique.
Rapport
annuel
2007,
p.
98,
en
ligne
:
http://www.iedom.fr/doc/RA2007_Martinique.pdf
(4)
iedom,
op.
cit.
p.
33.
(5)
Pourcentage
calculé
d'après
les
chiffres
fournis
par
l’iedom,
op.
cit.,
p
15.
(6)
Ce
modèle,
qui
repose
sur
la
capacité
de
l’économie
française
à
engendrer
des
surplus,
sur
un
principe
de
soutien
à
l'industrie
et
au
commerce
franco-français,
et
sur
une
logique
de
récupération
des
sommes
affectées,
pourrait
atteindre
ses
limites
en
cas
de
réduction
voire
de
disparition
desdits
surplus
suite
à
une
crise
majeure.
Il
est
aussi
obéré
par
la
globalisation
économique
(et
la
délocalisation
qui
lui
est
liée),
laquelle
induit
l’arrivée
croissante
en
Martinique
de
biens
de
consommation
non
français.
Dans
le
secteur
automobile
par
exemple,
alors
qu’il
y a
trente
ans
les
produits
importés
étaient
quasi
exclusivement
français
et
européens,
la
globalisation
a
provoqué
une
diversification
de
l’origine
de
ces
produits,
lesquels
proviennent
désormais
de
plus
en
plus
d’Asie
ou
d’ailleurs.
Des
pans
entiers
comme
l'informatique
ou
le
textile
proposent
aujourd’hui
des
marchandises
manufacturées
principalement
en
Asie.
Il
n’y
a
plus
que
l’alimentaire
qui
soit
encore
très
majoritairement
d’importation
française.
Cette
augmentation
de
la
diffusion
en
Martinique
de
biens
non
français,
ne
profite
en
France
qu’à
quelques
importateurs/réexportateurs
et
restreint
la
capacité
de
l’économie
française
à
récupérer
les
flux
monétaires
injectés
en
Martinique.
Elle
fragilise
d’autant
le
modèle
sur
lequel
est
établie
l’économie
martiniquaise.
(7)
La
Bible,
traduction
de
Louis
Segond,
1910,
Nombres
6.
5,
en
ligne :
http://www.info-Bible.org/lsg/04.Nombres.html#6
(8)
La
Bible,
op.
cit.,
Juges
16.
17-20,
en
ligne :
http://www.info-Bible.org/lsg/07.Juges.html#16
(9)
On
consultera
notamment
:
- Ajai Mansingh, "Rastafarianism
:
‘The
Indian
Connection’",
Sunday
Gleaner,
Kingston,
18
juillet
1982
- Ajai & Laxmi Mansingh, "Hindu
Influences
on
Rastafarianism",
Caribbean
Quarterly
Monograph,
UWI,
Mona,
p.
96-115,
1985.
- Laxmi & Ajai Mansingh, Home Away from Home. 150 years of Indian
Presence
in
Jamaica,
1845-1995,
Ian
Randle
Publishers,
Kingston,
1999.
(10)
Hélène
Lee,
Le
premier
rasta,
Flammarion,
Paris,
1999.
(11)
La
Bible,
op.
cit.,
Apocalypse
22.
2,
en
ligne
:
http://www.info-Bible.org/lsg/66.Apocalypse.html#22
(12)
La
Bible,
op.
cit.,
Romains
14.
21,
en
ligne
:
http://www.info-Bible.org/lsg/45.Romains.html#14
(13)
La
Bible,
op.
cit.,
Lévitique
15.
19,
en
ligne :
http://www.info-Bible.org/lsg/03.Levitique.html#15
(14)
L. &
A.
Mansingh,
1999,
op.
cit.,
p.
90.
(15)
Selon
certaines
sources,
la
ganja
ou "Bhanga",
"Bhang"
(le
terme
Bhang
désigne
aussi
la
décoction
de
cannabis)
est
réputée
avoir
été
produite
par
Shiva
à
partir
de
son
propre
corps.
Par
ailleurs,
un
texte
védique,
le
Atharvaveda
(1400-1000
av.
j-c),
fait
référence
à la
Bhanga
comme
à un
des
"cinq
royaumes
d’herbes
[…]
qui
nous
libère
du
malheur".
The
Hymns
of
the
Atharvaveda
:
Bhanga
(Hemp),
(11.
6.15),
en
ligne :
http://www.sacred-texts.com/hin/av/av11006.htm
16)
Louis
Frédéric,
Dictionnaire
de
la
civilisation
indienne,
Robert
Laffont,
Paris,
1987,
p.
557.
(17)
The
Mahabharata
(400
av.
j-c
–
400)
:
The
Descent
of
Ganga
(3.
107-109),
en
ligne :
http://www.sacred-texts.com/hin/m03/m03107.htm
(18)
Ramayan
of
Valmiki
(300
av.
j-c
–
300) :
The
Descent
of
Ganga
(1.
44),
en
ligne
:
http://www.sacred-texts.com/hin/rama/ry044.htm
(19)
Frédéric,
op.
cit.,
p.
410.
(20)
Lee
(d’après
A &
L.
Mansingh),
1999,
op.
cit.,
p.
126.
(21)
Lee
(d’après
A &
L.
Mansingh),
1999,
p.
126.
(22)
Le
Jamaïcain
Marcus
Mosiah
Garvey
fut
un
des
précurseurs
du
panafricanisme.
Il
eut
au
début
du
20e
siècle,
un
extraordinaire
succès
parmi
les
Afro-Américains,
qu’il
souhaitait,
dans
le
contexte
ségrégué
d’alors,
ramener
en
Afrique.
Son
association,
la
unia
(Universal
Negro
Improvement
Association),
était
à
l’époque
le
principal
moteur
du
nationalisme
noir.
(23)
Robert
Athlyi
Rogers,
originaire
d'Anguilla,
est
l’auteur
de
The
Holy
Piby,
publié
en
1924
à
Newark
(usa).
Ce
texte
prophétique
à
l'intention
des
Noirs,
"exalte
le
règne
d'un
nouveau
démiurge,
‘Dieu
le
Seigneur,
le
Père
de
l'Ethiopie’"
(Boris
Lutanie).
Cet
ouvrage
est,
avec
la
Bible
interprétée
de
manière
afrocentrée,
au
fondement
du
rastafarisme.
The
Holy
Piby,
en
ligne
(précédé
d'une
introduction
de
Boris
Lutanie)
:
http://www.webzinemaker.com/admi/m1/page.php3?num_web=2584&rubr=3&id=8602
(24)
"Gangun"
est
la
contraction
de "Gyan" :
Savoir
et
"Guna" :
Vertus ;
"Guru"
signifie
Enseignant
(Maître)
et "Maragh",
Grand
Roi
(L.
& A.
Mansingh,
1999,
op.
cit,
p.
119).
(25)
The
Promised
Key,
en
ligne :
http://sacred-texts.com/afr/tpk/index.htm
(26)
Hélène
Lee
(1999,
p.
128)
a
recueilli
de
Countryman
le
récit
de
l’enlèvement
de
sa
grand-mère
à
Bombay.
Il
raconte
une
histoire
qui,
à
quelques
détails
près,
est
la
même
que
celle
récoltée
par
Victorien
Permal
et
moi
auprès
du
Martiniquais
Zwazo
au
sujet
du
rapt
de
sa
grand-mère :
1)
une
fête
sur
un
bateau,
2)
des
organisateurs
accueillants,
3)
des
Indiens
invités
participent
à la
fête,
4)
Le
bateau
quitte
subrepticement
l’Inde.
On
retrouve
ce
récit,
avec
la
même
structure,
chez
les
descendances
indiennes
de
Trinidad,
Guyana,
Surinam,
etc.
Ce
mythe
est
distribué
dans
toute
la
Caraïbe
indienne
alors
même
que
les
descendants
d’Indiens
n’entretiennent
dans
bien
des
cas
aucune
relation,
et
met
en
scène
des
immigrants
qui
ont
embarqué
dans
des
ports
parfois
très
éloignés
les
uns
des
autres
(Pondichéry,
Calcutta,
etc.).
Enlèvement
de
la
grand-mère
de
Zwazo,
en
ligne :
http://www.potomitan.info/ki_nov/inde/zwazo.php
(27)
Brigitte
Sébastia,
Les
rondes
de
Saint-Antoine.
Culte,
affliction
et
possession
en
Inde
du
sud,
Aux
lieux
d’être,
Montreuil,
2007,
p.
81.
(28)
Source
:
http://www.authentic-remyhair.com/rajout-cheveux.htm